Le grand retour de l’entomophagie

 

Qu'est-ce qui a un "goût de noisette", est riche en protéine, pauvre en graisse, ne transmet pas de maladies à l'humain qui le consomme, et dont la production ne rejette que très peu de gaz à effet de serre ? L'insecte.

"Les Occidentaux doivent vraiment changer. J'exhorte d'autres organisations humanitaires à adopter une attitude différente à l'égard de cette (...) excellente nourriture, qui peut être durable moyennant certaines précautions", déclare l’entomologiste néerlandais Arnold van Huis, faisant remarquer que seuls les préjugés occidentaux écartent les insectes de l’aide humanitaire.

Pourtant, à une époque pas si éloignée, les insectes figuraient également au menu en Europe. Nous pensons ici à la soupe de hannetons printaniers que l’on pouvait déguster en France et en Allemagne, ou aux sauterelles que l'on pouvait déguster dans certains restaurants du Midi il y a encore quelques décennies, non par besoin, mais par goût. De fait, l’entomophagie – ou la consommation des insectes à des fins alimentaires – est très répandue dans le monde. Dans de très nombreux pays, soit 80% de la population mondiale, elle fait partie des mœurs alimentaires au même titre que la viande et le fromage en France, non par besoin mais aussi tout simplement par plaisir, les insectes se révélant être délicieux.

Sushis aux insectes à Vera Cruz (Mexique)

Or en Occident, la barrière psychologique reste très forte. Cette répulsion instinctive trouve son origine dans notre enfance, car il nous a été enseigné que les insectes sont sales, dégoûtants, répugnants... Sentiment que curieusement, nous n’éprouvons pas devant un escargot. Pourtant, nous mangeons tous des insectes sans le savoir. En France, la loi autorise la présence d'un maximum de 75 insectes fragmentés pour 50 grammes de farine de blé (essentiellement représentés par des vers de farine), 30 œufs pour 100 grammes de pâte à pizza ou encore 2 larves par boîte de maïs. Cependant une étude récente nous informe que chacun mange, à son insu, en moyenne 500 grammes d'insectes par an, dissimulés essentiellement dans le pain, mais aussi dans toute nourriture principalement d'origine végétale.

Selon le biologiste allemand V.B. Meyer-Rochow, les populations défavorisées ou en état de crise alimentaire pourraient tirer parti des invasions de criquets pèlerins qui ravagent régulièrement leurs récoltes. Il suggère de récolter les nuages d’insectes lors de leurs migrations, qui rassemblent des milliards d’individus pour une masse pouvant atteindre 400.000 tonnes, puis de les traiter et de les réduire en une pâte pouvant être utilisée comme complément alimentaire.

Les Indiens de l’Utah consomment depuis toujours cette manne venue du ciel, et peuvent ramasser – à la main – jusqu’à 8 kg de criquets pèlerins en une heure, ce qui représente 23.500 calories à la disposition de la tribu ! Reste que dans nos contrées occidentales, la consommation d’insectes n’a pas toujours connu les mêmes tabous. Curieusement, il a d’ailleurs été démontré que l’abandon de certaines de ces pratiques pouvait être corrélé avec l’apparition de maladies liées à la nutrition.

L’intérêt d’un tel retour aux sources n’est pas bénin, car l’abandon de certains tabous dans nos contrées pourrait laisser envisager plus librement des solutions efficaces dans le domaine de l’aide alimentaire, parfaitement en phase avec les pratiques ancestrales des populations concernées, et que nous répugnons d’aborder par simple préjugé.

L'étude du professeur Arnold van Huis peut être consultée ici sur le site de Plos One (en anglais).

 

 

 

Avec 10 kg d'aliments, il est possible de produire 1 kg de viande de boeuf ou 7 kg d'insectes comestibles.

 

 

 
 
 

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