7 novembre 2014

 

Les muscles de fer de la moule

 

La moule, mollusque bivalve bien connu, s'accroche à son substrat au moyen d'un faisceau de filaments d'une solidité et d'une souplesse surprenantes, le byssus. Leur analyse révèle leur secret : ils contiennent du fer !

Une équipe de chercheurs appartenant aux universités de Chicago et de Californie, ainsi que de l'Institut Max Planck à Postdam, a entrepris l'analyse structurelle détaillée des filaments du byssus. Car une énigme demeurait : si la composition de ces fibres protéiniques secrétées par la glande byssogène située dans le pied de la moule était déjà connue, elle n'expliquait pas leur extraordinaire résistance. Il y avait donc autre chose

Une nouvelle étude, effectuée par résonance magnétique nucléaire, spectroscopie Raman et diffraction aux rayons X, a démontré que la cuticule extérieure des filaments était non seulement riche en dopa, un acide aminé particulier très adhésif, mais surtout, était saturée d'ions ferriques qui leur confèrent leur solidité et leur souplesse. Ces résultats ont permis aux chercheurs de créer un modèle de cette structure biologique et de décrire sa distribution singulière en paquets, des zones denses dues au pontage par le dopa et le fer donnant la dureté, et des zones moins denses permettant de la rendre extensible.

Le plus étonnant est peut-être que cette particularité, sans être connue, a été utilisée par l'Homme depuis l'antiquité… Car une variété de moule répandue en Méditerranée, Pinna nobilis, a été exploitée jadis pour le byssus qu'elle produit et qui servait autrefois de base pour la confection d'un tissu extrêmement résistant et souple, connu sous le nom de soie marine, ou laine de poisson. Cette matière, sorte de soie brune aux reflets dorés, était aussi connue des Phéniciens, comme l'attestent plusieurs mentions apparaissant dans les sources écrites médiévales. Elle était aussi récoltée jusqu'au milieu du XXe siècle dans le golfe de Tarente et en Sardaigne. On utilisait notamment le byssus pour confectionner des gants, des bonnets, mais toujours des objets luxueux. Cette production a aujourd'hui disparu.

Mais la mention la plus surprenante se trouve peut-être dans la description de… l'Arche d'Alliance, ce coffre précieux censé avoir contenu les Tables de la Loi vers 1500 av. J-C, et dont on retrouve des équivalents dans divers récits historiques ou religieux. Selon la légende, les impies auraient été foudroyés au simple contact de ce coffre précieux et plusieurs historiens ont émis l'hypothèse qu'il se serait comporté comme un condensateur qui, se chargeant d'électricité statique, aurait envoyé une décharge mortelle à travers le corps des imprudents. David et les Lévites, chargés de la transporter, auraient quant à eux été revêtus d'un long manteau parcouru de fils métalliques touchant le sol par où l'énergie pouvait s'écouler. Or, selon l'ancien testament, les personnes qui transportaient l'Arche d'Alliance étaient revêtues d'un manteau de byssus, matière extrêmement précieuse (elle valait plus que son poids d'or), mais surtout… conductrice de l'électricité !

 
 

 

Bonnet tricoté au point jersey en byssus (XIVe siècle) - Musée de Saint-Denis (France).

 
 
 

 
Les "racines" de la moule, ou byssus. Crédit Ouest-France.
 

 

 
 
 

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