22 novembre 2014

 

L'hémorragie gazeuse de M106

 
Le télescope spatial Spitzer a démontré que la galaxie M106 produit environ dix fois moins d'étoiles que notre propre galaxie, la Voie Lactée. Or, cette dernière est déjà classée parmi les plus calmes sur ce plan là… Et Herschel, son homologue européen en orbite autour du point de Lagrange L2, confirme cette observation dans l'infrarouge : il trouve très peu de gaz dans M106, 10 fois moins qu’estimé auparavant. Tout indique donc que cette galaxie a déjà expulsé une grande partie de ses gaz, ce qui contrecarre la formation de nouvelles étoiles en son sein.

En cause, un trou noir géant, au moins dix fois plus grand que celui qui se tapit au centre de notre galaxie, qui attire et accélère la matière avoisinante constituée surtout de gaz. « Ces accélérations provoquent un échauffement qui contribue à la forte luminosité du centre de la galaxie » indique Olivier La Marle, coordinateur des programmes d’astrophysique au CNES. Sur l'image produite par combinaison entre les données des différents observatoires spatiaux, un tourbillon de couleurs plonge au cœur de la galaxie M106, tandis que la densité des étoiles et du gaz y est tellement forte que seul du blanc en rejaillit.

« Mais ce qui interpelle le plus dans cette image, ce sont les bulles bleues observées par le télescope spatial Chandra dans les rayons X. Elles correspondent aux rayonnements de gaz ionisés dont les températures atteignent des millions de degrés. Ces amas de gaz seraient échauffés et chassés progressivement hors de la galaxie par les jets de particules – des électrons, des protons, mais aussi des ions – émis par le trou noir. Cette théorie expliquerait pourquoi la galaxie M106 forme peu d’étoiles puisqu’elle perd son gaz », ajoute Olivier La Marle.

Située à 23 millions d’année lumière de la Terre, la galaxie M106 a été découverte en 1781 par un astronome français, Pierre Méchain. Il était l’ami de Charles Messier, le créateur du catalogue des objets du ciel profond qui porte son nom. M106 est d’ailleurs le raccourci de "Messier 106".

 

 

 
Les trous noirs attirent mais expulsent aussi de la matière. Sur l’image, les bulles bleues fantomatiques
sont des amas de gaz surchauffés éjectés par le trou noir situé au centre de la galaxie M106.
Crédits image : X-ray: NASA/CXC/Caltech/P.Ogle et al; Optical: NASA/STScI; IR: NASA/JPL-Caltech; Radio: NSF/NRAO/VLA.
 
 
 

 
4 « clichés » de M106 ont été utilisés pour réaliser l'image principale. De haut en bas et de gauche à droite :
- Rayons X émis par la galaxie et observés par le télescope spatial Chandra (nuages de gaz et de poussières surchauffés) ;
- Spectre visible reçu par Hubble (étoiles et nuages de poussières) ;
- Ondes radios captées par les 27 antennes paraboliques du Very Large Array installées aux Etats-Unis ;
- Ondes infrarouges observées par le télescope spatial Spitzer (les objets froids, nuages et filaments de poussières, cœurs pré-stellaires). Crédits : X-ray: NASA/CXC/Caltech/P.Ogle et al; Optical: NASA/STScI & R.Gendler; IR: NASA/JPL-Caltech; Radio: NSF/NRAO/VLA.
 
 
 

 
Les trous noirs attirent la matière à courte distance (en jaune) les mettant en rotation autour d'eux (en violet). Mais ils expulsent aussi des quantités de particules par des jets (en blanc) tels des toupies (vue d'artiste). Crédits : ESA/ATG medialab.
 

 

 
 
 

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