24 octobre 2014

 

Mimas pourrait cacher un noyau fortement aplati ou un océan interne

 

À partir d'observations réalisées par la sonde Cassini, une équipe internationale, comprenant des chercheurs de l'Observatoire de Paris et de l'Université Pierre et Marie Curie à l'IMCCE (Observatoire de Paris/CNRS/UPMC/Université Lille 1) et au laboratoire AIM (CEA/CNRS/Université Paris Diderot), a mesuré la rotation de Mimas, une lune de Saturne, et y a détecté des oscillations. Non conformes aux modèles prédictifs, ces oscillations laissent penser que Mimas pourrait abriter un noyau fortement aplati ou un océan sous sa couche de glace.

La rotation de Mimas a été mesurée à partir des images de la sonde ESA/NASA Cassini, à l'aide d'une technique à l'utilisation peu connue, dite de stéréophotogrammétrie . Tout comme la Lune autour de la Terre, Mimas est en rotation synchrone autour de Saturne, sa planète. Cela signifie que ce satellite tourne sur lui-même à la même vitesse qu'il effectue une révolution autour de Saturne, montrant ainsi toujours la même partie de sa surface à sa planète.

Toutefois, à ce mouvement moyen uniforme, se superposent des oscillations. Ces oscillations sont appelées librations. Les librations résultent du couple de force gravitationnelle exercée par Saturne sur Mimas. Les travaux menés par une équipe internationale impliquant des chercheurs français de l'Institut de mécanique céleste et de calcul des éphémérides de l'Observatoire de Paris (Observatoire de Paris/CNRS/Université Pierre et Marie Curie/Université Lille 1) et du laboratoire AIM (CEA/CNRS/Université Paris Diderot) et des scientifiques de l'Observatoire Royal de Belgique, l'Université de Namur (Belgique) et l'Université de Cornell (Etats-Unis) ont permis de mettre en évidence deux types de librations: l'un à basse fréquence, l'autre à haute fréquence. Or, sur ces deux types, celui à haute fréquence présente une amplitude deux fois plus importante, incompatible avec le modèle de rotation d'un satellite, solide, à l'équilibre hydrostatique. Cette amplitude est révélatrice de la distribution de masse à l'intérieur du corps et de la présence ou non de couches liquides.

Ces observations sont donc surprenantes et révèlent une structure interne intrigante. Après avoir exploré plusieurs hypothèses, il apparaît que cette forte amplitude peut s'expliquer soit par la présence, sous le manteau de glace de Mimas, d'un noyau de roche de forme très allongée, soit par l'existence d'un océan interne caché entre sa surface glacée et son noyau.

En effet, les planétologues supposent que le noyau de Mimas doit être à l'équilibre hydrostatique (où les forces de gravitation, centrifuge et de pression s'équilibrent dans le corps), par conséquence d'un âge de formation très ancien. Or la forte amplitude de la libration à haute fréquence pourrait indiquer un noyau présentant un allongement de 20 à 60 kilomètres plus important que dans le cas hydrostatique. Si le noyau de Mimas est bien allongé, alors il aurait gelé depuis sa formation et aurait conservé en grande partie sa forme initiale. En revanche, si Mimas possède un océan interne, il rejoint alors le club des "satellites à océan interne" du Système solaire incluant plusieurs lunes de Jupiter et Titan, un autre satellite de Saturne. Un tel océan global serait une véritable surprise car la surface de Mimas ne présente aucun signe d'activité géologique récente. Des observations supplémentaires de Cassini permettront d'affiner les modèles d'intérieur de Mimas.

Que ce soit l'une ou l'autre de ces deux solutions, nous savons dorénavant que Mimas, malgré sa surface apparemment ancienne criblée de cratères et sa petite taille, n'est pas l'astre froid et inerte que l'on imaginait. Percer le secret de son intérieur éclairera sûrement sur sa formation, et par là-même sur la formation du système de Saturne dans sa globalité.

Source : Mimas' surprising interior: Strong constraints from Cassini ISS libration measurements, R. Tajeddine, N. Rambaux, V. Lainey, S. Charnoz, A. Richard, A. Rivoldini, B. Noyelles, Science, 17 octobre 2014.

 

 

 
Mimas. Crédit Nasa.
 

 

 
 
 

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