Elysia chlorotica, seul animal connu à réaliser la phosynthèse

 

Un modeste gastéropode opisthobranche marin, autrement dit une limace de mer, pourrait se prévaloir du titre d'être vivant le plus évolué du règne animal. Il réalise en effet ce qui était encore considéré comme impossible voici quelques mois : tirer son énergie de la photosynthèse.

Plusieurs animaux sont connus pour tirer une partie de leur énergie vitale de la photosynthèse, comme les coraux, ou encore les tridacnes, ces coquillages de grandes dimensions aussi connus sous le nom de bénitiers. Mais cette conception est abusive, car ces organismes utilisent en réalité les cellules photo-synthétiques absorbées de leurs proies, qu'elles intègrent ensuite dans leur système digestif et apprivoisent à leur propre service.

Chez Elysia chlorotica cependant, rien de tel. Bien que ce petit gastéropode de 5 cm se nourrisse aussi d'algues comportant des cellules photo-synthétiques, celles-ci sont détruites durant la digestion et les chloroplastes intégrés dans leurs propres cellules, leur permettant de réaliser elles-mêmes la photosynthèse.

C'était déjà étonnant et unique dans le règne animal, mais une énigme demeurait. Car cette limace de mer ne se nourrit que durant le premier mois de son existence, tirant ensuite son énergie exclusivement de la photosynthèse. Or, si les chloroplastes possèdent bien leur propre génome, celui-ci n'est pas suffisant pour les maintenir en activité durant une année, ou plus, comme on le constate souvent en captivité (Elysia chlorotica est assez commune en aquariophilie).

Une piste était apparue en 2007, lorsque Sidney Pierce, un chercheur de l'Université d'Etat de Floride du Sud, avait déjà mis en évidence la présence de gènes liés à la photosynthèse dans les œufs de la limace de mer, qui visiblement n'étaient pas liés à la consommation d'algues. Puis plus récemment, un plus grand nombre de gènes d'origine végétale, dont certains codent pour des enzymes impliquées dans la synthèse de la chlorophylle, ont été découverts dans les cellules de l'animal. Mais ce dernier est-il capable de réellement synthétiser sa propre chlorophylle, ce qu'aucun organisme connu, excepté les plantes, n'est capable de réaliser ?

 
 

 

Elysia chlorotica - crédit PNAS

 

Quelque part entre plante et animal

Pour répondre à cette question, l'équipe de Sidney Pierce a nourri des spécimens ne s'étant plus alimentés depuis 5 mois – donc exempts de toute trace d'algue - d'un acide aminé impliqué dans la production de chlorophylle, mais marqué d'un atome de carbone radioactif. Une partie des animaux a été exposée à un bain de soleil, une autre, servant de témoin, étant maintenue dans l'obscurité.

Le résultat de l'expérience est net et sans appel : les limaces de mer exposées au soleil avaient synthétisé de la chlorophylle en abondance, où on retrouvait le carbone radioactif marqueur, et l'utilisaient comme unique source d'énergie. Par contre, celles qui avaient été privées de lumière dépérissaient, totalement exempte de chlorophylle.

Elysia chlorotica est donc le seul animal connu capable de synthétiser la chlorophylle et de l'utiliser comme unique source d'énergie. Le plus étonnant est peut-être que cette chlorophylle est répartie dans la paroi de son tube digestif, lequel, dans un souci d'efficacité, s'est fortement ramifié et développé à l'intérieur d'une surface plane entourant l'animal, prenant l'aspect d'une feuille d'arbre dont elle exhibe fièrement la couleur !

Quoi qu'il en soit, le bond évolutif est énorme et Elysia chlorotica pourrait bien être la pionnière d'un nouvel embranchement de l'évolution, transcendant à la fois la plante et l'animal en cumulant la source d'énergie illimitée de l'une à la mobilité de l'autre.

 
 

 

Elysia chlorotica - crédit PNAS

   
 
 
 

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