2 février 2015

 

Black Beauty, la météorite martienne qui nous raconte la Planète rouge

 
Découverte en 2011 dans le désert du Sahara, la météorite martienne de 320 grammes NWA 7034 (pour Northwest Africa 7034), affectueusement nommée Black Beauty, présente des caractéristiques uniques et d'un très grand intérêt pour les scientifiques et les astronomes.

Estimé à 2,1 milliards d'années, son âge en fait un des plus anciens échantillons de la surface de la Planète rouge que l'on possède (devant ALH 84001 – 4,1 milliards d'années, NWA 7635 et NWA 8159 – 2,3 milliards d'années chacun). Cependant son intérêt réside surtout dans sa non appartenance aux trois principaux groupes de météorites martiennes que l'on possède actuellement, les SNC : Shergottites, Nakhlites et Chassignites, soit essentiellement des roches ignées de matière volcanique refroidie.

A contrario Black Beauty est une brèche, c'est-à-dire une roche formée par conglomérat résultant de la dégradation mécanique d'autres roches, sédimentaires ou volcaniques, réunies dans une matrice basaltique. Sa richesse en eau s'avère aussi dix fois supérieure à tous les échantillons similaires. Cette eau a pu provenir d'une source volcanique ou d'un aquifère proche de la surface, ce qui laisse penser qu'une activité aqueuse a persisté à la surface de Mars au début de sa première période géologique, l'ère de l'Amazonien, qui a débuté il y a 3 milliards d'années.

L'analyse a révélé des composants sédimentaires similaires à la composition chimique des roches analysées sur la surface martienne par les rovers martiens, ce qui a permis aux chercheurs de conclure qu'ils étaient en possession d'un échantillon de la croûte de la planète, le premier à être formellement identifié comme tel. Dans un document récent, les scientifiques rapportent que des mesures spectroscopiques de la météorite sont parfaitement en phase avec les observations effectuées depuis l'orbite des plaines martiennes sombres, les zones où la couche de poussière rouge de la planète est particulièrement mince et où les rochers sous-jacents percent la surface. Selon Kelvin Cannon, un étudiant diplômé de l'Université Brown (Providence, Etat de Rhode-Island), Black Beauty est un véritable patchwork de roches enfouies sous la surface martienne.

Un mystère ancien élucidé grâce à Black Beauty

Kevin M. Cannon, un géologue de l'Université Brown spécialisé en sciences planétaires et principal auteur de l'étude, souligne que Black Beauty permet d'élucider un mystère de longue date. En effet, le signal spectral des météorites SNC ne correspond jamais tout-à-fait avec les données spectrales recueillies de la surface martienne par les sondes en orbite. "La plupart des échantillons martiens sont assez semblables aux mesures des engins spatiaux", déclare le chercheur, "mais tout en restant fâcheusement différents". Ainsi, après avoir fait l'acquisition d'un fragment de Black Beauty, Cannon a utilisé un système d'imagerie hyperspectrale développé par Headwall Photonics Inc., une société basée dans le Massachussetts, permettant l'analyse spectrale détaillée de l'ensemble de l'échantillon.

"D'autres techniques nous donnent des mesures d'un point précis", déclare Cannon. "Ce que nous voulions faire, c'était obtenir une moyenne pour l'ensemble de l'échantillon. Et cela nous a donné un résultat cette fois identique aux données orbitales".

Les chercheurs estiment à présent que cette analyse spectrale permet de mettre un visage sur les plaines sombres, qui suggère que ces régions sont dominées par des roches de brèche semblables à Black Beauty. "Nous pensons donc que ces zones sombres sont représentatives de ce qui se présente sous la poussière rouge d'une grande partie du reste de la planète. Si vous alliez sur Mars et que vous ramassiez un morceau de croûte, vous pourriez vous attendre à ce qu'il se présente choqué, concassé et réaggloméré", conclut Cannon. "Mars est criblé de plus de 400.000 cratères d'impact de plus de un kilomètre de diamètre. La 'bréchification' étant une conséquence naturelle de ces impacts, il est normal que du matériau similaire à NWA 7034 se soit accumulé sur Mars au fil du temps".

Jean Etienne

Source (entre autres) : Meteorite may represent ‘bulk background’ of Mars’ battered crust

 

 

 
NWA 7034 (présentant ici une face sciée et polie) en comparaison avec un cube de 1 cm de côté. Crédit Université Brown.
 
 
 
 
Vue microscopique d'un fragment de NWA 7034. Crédit Université Brown.
 

 

 
 
 

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