17 juin 2015

 

La découverte de petites exoterres est imminente

 
L'évolution des systèmes de détection atteint à présent un tel niveau que la découverte de planètes extrasolaires de type rocheux non seulement de masse terrestre, mais aussi bien plus petites que notre Terre, est imminente.

Depuis plus de quatre cents ans, les astronomes produisent des télescopes afin de mieux comprendre notre environnement galactique. De Galilée à aujourd’hui, les méthodes d'observation ont passé de l'œil nu à la spectroscopie, en passant par les télescopes géants et la photographie. Et aujourd'hui, un pan entier de l'astronomie se consacre à la détection de formes de vie extraterrestres dans l'Univers.

Ces tentatives de détection se font selon trois grands axes. Le premier vise à discerner des émissions radio de signaux intelligents en provenance du cosmos, le second se concentre sur la recherche de traces de vie au sein de notre propre Système solaire, notamment sur Mars et Europa, une des lunes de Jupiter, et le troisième se focalise sur la recherche d'exoplanètes de type terrestre et de l'étude de leurs atmosphères afin de déterminer si elles sont susceptibles d'abriter une forme de vie.

Premières détections

Sur une idée proposée en 1987 par Antoine Labeyrie, l'optique adaptative a été appliquée pour la première fois à un télescope en 1996 à Calar Alto. Largement améliorée depuis, cette technologie équipe aujourd'hui l'ensemble des télescopes modernes et permet de corriger en temps réel l’effet de flou provoqué par l’atmosphère terrestre, permettant ainsi de recueillir des images proches de la limite de diffraction de l'instrument et d’atteindre un rendu comparable à ce que l’on peut attendre d’un télescope positionné dans l’espace. Tirant profit de l’amélioration des caméras et détecteurs infrarouges, de l’utilisation de la coronographie et des miroirs déformables, les télescopes modernes ont alors permis la détection des premières exoplanètes.

Lancé le 7 mars 2009 par la Nasa, le télescope spatial Kepler était consacré à la détection de planètes orbitant autour d'autres étoiles. Mais il était aussi capable de fournir de nombreux renseignements sur ces objets tels que leur masse, leur orbite, et par voie de conséquence, de fournir aux astronomes la proportion d’étoiles possédant des planètes à l’intérieur de leur zone d'habitabilité, soit la région où les conditions d'apparition d'une forme de vie telle que nous pouvons la concevoir sur le modèle terrestre sont réunies.

La moisson a été fructueuse et n'est d'ailleurs pas terminée, avec plus de 5000 planètes découvertes, dont près de 2000 ont été officiellement confirmées. Un tel échantillonnage permet d'ores et déjà aux scientifiques de déterminer deux choses essentielles. En premier lieu, il est maintenant acquis, statistiquement parlant, que chaque étoile de notre galaxie possède une à deux planètes tournant autour d'elle. Ensuite, il apparaît que l'immense majorité des planètes sont d'une taille largement supérieure à la Terre, avec une majorité plus proche de la masse de Jupiter.

Cependant, Kepler n'est équipé que d'un photomètre dont la fonction se limite à mesurer les très faibles sursauts d'intensité du rayonnement des étoiles, trahissant le passage d'une planète devant son propre soleil. Et très logiquement, l'étape suivante a consisté à obtenir des images de ces exoplanètes.

Premières images

En novembre dernier, la Nasa mettait en service le Gemini Planet Imager (GPI), un instrument délivrant des images à très haut contraste, conçu et construit pour le télescope Gemini-Sud situé près de La Serena au Chili. GPI est optimisé pour les faibles séparations angulaires, ce qui lui permet d’imager directement et de mesurer le spectre des objets extrasolaires orbitant autour d’étoiles voisines du Soleil. Grâce à cet instrument, l'Homme est aujourd'hui capable non seulement de détecter une planète tournant autour d'une autre étoile, mais aussi de l'observer directement, et d’analyser la composition de son atmosphère afin d’évaluer sa probabilité d’abriter une forme de vie.
 
 

 
La planète Beta Pictoris b, photographiée à dix ans d’intervalle, par le Very Large Telescope européen, en 2003, à gauche, et par le télescope Gemini South, en 2013, à droite. En une décennie, la planète a parcouru la moitié de son orbite autour de l’étoile Beta Pictoris, cachée par un masque focal. La planète, environ huit fois plus massive que Jupiter et portée à une température d’environ 1200 °C, est beaucoup plus lumineuse que les planètes du système solaire. Photos A.M Lagrange/Naco/VLT/ESO et GPI/Gemini South.
 
Ici une petite parenthèse s'impose. On pourrait imaginer que la principale difficulté à vaincre pour observer directement une planète tournant autour d'une autre étoile réside essentiellement dans l'énorme distance qui nous en sépare. Il n'en n'est rien. En fait cette planète, quelle qu'elle soit, n'émet aucune luminosité par elle-même et se contente de réfléchir celle qu'elle reçoit de la part de son étoile. Sa magnitude est donc extraordinairement faible, mais il y a plus grave: vue de la Terre, elle est complètement noyée dans l'éclat de son étoile. A titre de comparaison, observer directement une planète extrasolaire consiste à discerner, depuis Marseille, une luciole voletant à 10 centimètres d'un phare allumé situé sur une côte bretonne.
 
 

 
L'instrument GPI a fourni la première image du disque de poussière entourant la jeune étoile HR4796A. Cet anneau pourrait être consitué par une ceinture d'astéroides ou de débris laissés suite à la formation de planètes; certains scientifiques ont théorisé que le tranchant de l'anneau est défini par une planète encore invisible. L'image de gauche (1,9-2,1 microns) est en lumière visible, incluant à la fois l'anneau de poussière et la lumière résiduelle de l'étoile centrale diffusée par la turbulence dans l'atmosphère de la Terre. L'image de droite est en lumière polarisée. L'image de l'étoile, non polarisée, est donc estompée. Fortement polarisée, la partie antérieure du disque est particulièrement brillante. Crédit : Gemini Planet Imager.
 
GPI est équipé de nombreux composants de pointe, incluant un système d’optique adaptative à très haut contraste, un interféromètre, un coronographe et un spectrographe à champ complet. Les premières images d’exoplanètes de taille comparable à Jupiter ont déjà pu être effectuées et ceci ne semble être que le commencement.

Premières découvertes de petites planètes telluriques

Mais pour aussi spectaculaires qu'elles soient, ces nouvelles avancées s'appuient aussi sur le perfectionnement de procédés déjà utilisés. Ainsi, la méthode de détection par technologie du transit est en pleine évolution. Ce procédé, qui permet déjà de caractériser très précisément l'orbite d'une planète extrasolaire autour de son étoile, ouvre désormais la voie à d'autres méthodes sous-jacentes, avec la possibilité de mettre en évidence l'existence de planètes telluriques de très faible masse par l'étude des perturbations orbitales des planètes voisines.

Par la découverte de planètes telluriques plus petites que la Terre, ce sont des systèmes extrasolaires au complet qui seront désormais à la portée des astronomes. Et cela, c'est VRAIMENT imminent…

Jean Etienne

 

 

 
Le télescope spatial Kepler. Crédit : Nasa.
 

 

 
 
 

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