5 mars 2015

 

Comment détecter la vie extraterrestre grâce au mouvement

 
Des chercheurs de l’EPFL (Ecole Polytechnique Fédérale de Lausanne) ont développé un système ultrasensible capable de détecter des formes de vie en repérant le moindre mouvement. Ce système, dépourvu de chimie, peut tester rapidement des antibiotiques et même partir en quête de traces de vie sur d’autres planètes.

La recherche de signes de vie extraterrestre n’est pas chose aisée. Elle est traditionnellement basée sur la détection chimique. Or, celle-ci pourrait s’avérer un outil limité, voire totalement inadapté en présence de la biologie particulière d’autres planètes. En revanche, le mouvement est une caractéristique universelle de la vie. Il pourrait donc être utilisé pour identifier des micro-organismes sans nécessiter de connaissance chimique préalable. Des chercheurs de l’EPFL ont ainsi développé un détecteur de mouvement sensible, pratique et facile à fabriquer en adaptant une technologie déjà existante. Ce système s’est montré fiable pour détecter des bactéries, levures et cellules cancéreuses. Il pourrait servir à tester rapidement des médicaments, ainsi qu’à détecter des vies extraterrestres. Cette étude est publiée par Proceedings of the National Academy of Sciences (PNAS).

Giovanni Dietler, Sandor Kasas et Giovanni Longo de l’EPFL ont en effet mis au point un détecteur de mouvement fonctionnant grâce à un système en porte-à-faux de taille nano (un porte-à-faux consiste principalement en une poutre rattachée à une seule extrémité, l’autre supportant une charge). Un tel système est souvent utilisé dans le monde des ponts et bâtiments. Implémenté ici à l’échelle du micromètre, il peut accueillir 500 bactéries.

L’idée s’inspire d’une technologie empruntée au microscope à force atomique. Très puissant, celui-ci a recours à un porte-à-faux pour produire une représentation de chacun des atomes d’une surface. Pour ce faire, il scanne ladite surface comme l’aiguille d’un tourne-disque. Son mouvement vers le haut et le bas est ensuite lu par un laser afin de produire une image.

Le détecteur de mouvement développé par Dietler et Kasas fonctionne de la même manière, à la différence que l’échantillon se lie directement au porte-à-faux. Ainsi, si une bactérie qui y est déposée est en vie, elle produira forcément un mouvement, soit par sa flagelle, soit au travers de ses fonctions biologiques normales. Ce mouvement se répercutera sur le porte-à-faux, plus petit et plus sensible, et sera identifié par le laser de lecture comme une série de vibrations. Ce signal sera alors perçu comme un signe de vie.

Des premiers tests concluants

Les chercheurs de l’EPFL ont testé avec succès ce système novateur sur des bactéries isolées, de la levure, des cellules humaines et de souris, ainsi que sur un échantillon de sol du campus de l’EPFL et de l’eau de la Sorge. A chaque fois, ils ont pu détecter et isoler de façon précise des signatures vibratoires de cellules vivantes. Ce signal a en revanche disparu après l’application de substances antibiotiques.

"Ce système a l’avantage de ne pas dépendre de la chimie, explique Giovanni Dietler. Il peut donc être utilisé partout – pour faire des tests de médicaments ou détecter des formes de vie extraterrestre". D’après les scientifiques,un large spectre de senseurs en porte-à-faux pourraient être utilisés dans les futures sondes d’exploration spatiale, notamment sur Mars. Comme il dépend du mouvement et non de la chimie, le senseur développé à l’EPFL est capable de détecter des formes de vie dans les éléments spécifiques d’une planète ou d’un astre, par exemple dans le méthane des lacs de Titan, le plus grand satellite de Saturne.

Toutefois, l’une de ses applications les plus immédiates est le développement de médicaments. Employés à large échelle, les porte-à-faux pourraient en effet être recouverts de bactéries ou de cellules cancéreuses et incubés avec différents composés médicamenteux. Si ces derniers sont efficaces, le signal de mouvement décroîtra et s’arrêtera. Cette approche serait plus rapide que les systèmes actuels utilisés par l’industrie pharmaceutique dans la recherche de traitements antibiotiques et anticancer.

"C’est l’étape suivante", précise Giovanni Dietler. "A ce stade, nous sommes en train d’appeler l’ESA et la NASA pour voir s’il existe un intérêt de leur part". C'est tout ce qu'on leur souhaite...

Cette étude est une collaboration entre le Laboratoire de physique de la matière vivante de l’EPFL, l’Université de Lausanne et le Vlaams Institute for Biotechnology de Belgique.

Source :

Detecting nanoscale vibrations as signature of life (Proceedings of the National Academy of Sciences of the United States of America).

Complément vidéo (PNAS)

 

 

 

 

 
 
 

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