28 avril 2015

 

L'homéopathie à l'épreuve de la science

 
Nombreux sont les témoignages de personnes qui s'estiment guéries par le recours aux petits granules homéopathiques. Cette médecine douce prétend traiter toutes sortes de maux, de l'insomnie au rhume en passant par les allergies, l'anxiété et le déficit de l'attention. Mais l'efficacité de l'homéopathie a-t-elle été prouvée scientifiquement ?

C'est la question que s'est posée Serge Larivée, qui en a fait l'objet d'une analyse parue dans le dernier numéro de la Revue de psychoéducation. "J'ai été mis au courant par des psychoéducateurs que des parents recouraient à des produits homéopathiques pour aider leur enfant qui avait des problèmes d'apprentissage", raconte le professeur de l'École de psychoéducation de l'Université de Montréal. "J'ai voulu en savoir plus".

En se basant sur une bibliographie riche, Serge Larivée et ses collègues passent à la moulinette des essais cliniques et des ouvrages sur l'homéopathie, très en vogue actuellement. Verdict ? L'homéopathie ne guérit rien du tout ! Même aux yeux des plus optimistes, son effet ne se résume qu'à celui d'un placébo. "Pour l'heure, les résultats des recherches sérieuses en homéopathie tendent plutôt à démontrer l'inefficacité des produits homéopathiques", affirme le professeur.

L'une des autres forces de son analyse, c'est son intérêt pour les concepts empruntés aux sciences dures que les homéopathes utilisent "pour tenter de faire sérieux". "C'est le cas du concept de la mémoire de l'eau, que des homéopathes ont tenté de récupérer à leur profit pour justifier l'activité de leurs produits même lorsque la dilution de ceux-ci est telle qu'ils ne contiennent plus de molécules actives", indique M. Larivée. (*)

Si diluée qu'il ne reste rien

Rappelons que les traitements homéopathiques sont obtenus à partir de la dilution d'une solution contenant une substance active qui nécessite à chaque étape une préparation "particulière"... La solution doit être agitée ! Or, au terme de cette dilution, il est scientifiquement impossible qu'il subsiste la moindre molécule active. Cela en vertu d'une loi de la physique énoncée dès 1811 par le chimiste italien Amedeo Avogadro. "Que l'homéopathie marche, c'est-à-dire qu'une substance demeure active même s'il n'en reste plus une seule molécule, et cette loi d'Avogadro devrait alors être remise en question, signale le professeur Larivée. Vu les répercussions possibles, l'affaire ne passerait pas inaperçue !"

Comment expliquer alors que plusieurs croient que l'homéopathie puisse guérir ou même avoir un effet thérapeutique supérieur à celui d'un simple effet placébo ? "Difficile à dire, répond Serge Larivée. Tenter de convaincre un utilisateur de l'inefficacité des produits homéopathiques revient à tenter de convaincre des croyants que Dieu n'existe pas".

Problèmes éthiques

Dans son étude, il soulève aussi quelques problèmes éthiques, soulignant que les risques associés à la prescription des produits homéopathiques et à l'utilisation des «vaccins» de même nature ne sont pas sans conséquence. Pourquoi n'est-il pas anodin que des gens investissent dans des substances inertes ? "Le problème éthique survient quand certains homéopathes incitent leurs patients à délaisser leurs médicaments allopathiques au seul profit de leurs produits", écrit Serge Larivée. "Si, de surcroît, l'homéopathe dénigre les remèdes de la médecine traditionnelle et promeut le marché homéopathique, il annule la possibilité d'un traitement médical efficace".

Le professeur Larivée rappelle qu'au Canada, depuis 2004, les remèdes homéopathiques font partie des produits de santé naturels (PSN). "Ils obéissent non pas à la réglementation des médicaments, mais à celle des PSN. Cette réglementation est de loin bien moins contraignante que celle régissant les médicaments et ne nécessite pas d'essais cliniques avant la mise en marché", déplore-t-il.
 
(*) Un produit homéopathique s'obtient par dilutions successives à 1%. Le nombre suivi de la mention CH indiqué sur l'étiquette mentionne le nombre de ces dilutions successives à 1% pratiquées pour l'obtention du "médicament". Or, si 1CH correspond à 1% (il n'existe aucun produit homéopathique de ce type) ou 1 partie pour 100, 2CH correspond à 1 partie pour 100 x 100 = 10.000, 3CH à 1 partie pour 100 x 100 x 100 = 1.000.000, etc. Or, la physique nous enseigne qu'à partir de 12CH (soit 1 partie pour 1 suivi de 24 zéros), en tenant compte du nombre de molécules, la dilution devient tellement importante qu'il ne subsiste dans le produit PLUS UNE SEULE MOLECULE du composé initial. La plupart des petites granules que l'on vend, enrubannées de promesses qui feraient pâlir n'importe quel politicien, vont pourtant bien au-delà de ce seuil, jusqu'à 30CH (c'est-à-dire 1 partie pour 1 suivi de 60 zéros). Pour vous situer, notons simplement que le nombre de grains de sable sur la Terre entière est représenté par 1 suivi de 23 zéros...

Pour donner une représentation encore plus simple, imaginons un énorme container rempli de la totalité du sable existant sur notre Terre. Nous prélevons ensuite un grain de sable ailleurs (sur Mars, peut-être...) et le fractionnons en dix parts égales. Nous prenons ce dixième de grain de sable et le jetons dans le container. Nous avons ainsi obtenu un "médicament" homéopathique à 12CH...

Source principale : S. Larivée, C. Sénéchal et J.-L. Brazier : Le nombre d'Avogadro en prend pour son rhume : l'homéopathie en question, Revue de psychoéducation, vol. 43, no 2, p. 349-386.

 

 

 
Quels qu'ils soient, les produits homéopathiques ne contiennent rigoureusement rien de ce qu'indique leur étiquette.
 

 

 
 
 

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