17 novembre 2015

 

La fonte des glaces de l'Antarctique pourrait être considérablement freinée

 
Une nouvelle étude contredit la prédiction, émise une semaine plus tôt, selon laquelle la fonte accélérée des glaces de l'Antarctique devrait rapidement provoquer une élévation catastrophique du niveau de la mer.

Depuis près d'un an, diverses études ont conclu que de vastes zones de la calotte ouest de l'Antarctique seraient sur le point de connaître un recul massif. Le 3 novembre dernier, un article publié dans les Proceedings of the National Academy of Sciences (PNAS) prédisait que ce phénomène entraînerait une hausse mondiale du niveau des océans pouvant atteindre trois mètres.

Une nouvelle étude, publiée dans Nature Communications le 10 novembre par le Department of Earth and Planetary Sciences de l'Université Mc Gill (Montréal – Canada) estime que la fonte prévue de l’énorme calotte glaciaire de l’ouest de l’Antarctique pourrait être ralentie par deux importants facteurs généralement ignorés dans les modèles informatiques actuels.

La géophysique du globe prise en compte

Les chercheurs mettent en lumière deux facteurs géophysiques qui, selon eux, ne sont pas adéquatement pris en compte dans les simulations informatiques concernant cette région : la puissance surprenante de l’attraction gravitationnelle de l’énorme calotte glaciaire sur les eaux environnantes, et la nature particulièrement fluide du manteau terrestre qui se trouve sous le substrat rocheux sur lequel repose la glace. L'étude suggère que l’effet du recul des glaces sur l’augmentation du niveau mondial des océans pourrait être moins important, ou du moins plus graduel que prévu.

"La fonte des calottes glaciaires polaires en raison du réchauffement est une préoccupation majeure pour les décideurs comme pour le public. L’attention générale est attirée à juste titre sur l’importance de réduire les émissions de gaz à effet de serre et de nous préparer à l’élévation du niveau de la mer", affirme Natalya Gomez, auteure principale de l’étude et professeure adjointe au Département des sciences de la Terre et des planètes de l’Université McGill, à Montréal. "Notre étude montre aussi que, tout particulièrement en Antarctique, les modèles informatiques doivent tenir compte de la manière dont les effets de la gravité et les variations dans la structure de la Terre influent sur la vitesse de la fonte des calottes glaciaires".

L’effet de la gravitation locale

Si la gravitation terrestre est bien la force qui nous maintient à la surface de notre planète, toute masse importante exerce aussi une attraction proportionnelle autour d'elle. Ainsi, les énormes quantités de glace recouvrant certaines parties de l'Antarctique, chiffrées en milliards de tonnes, exercent une attraction gravitationnelle sur d'autres corps, y compris l'eau environnante.

Selon les scientifiques ayant participé à cette nouvelle étude, la réduction de la calotte polaire, donc de sa masse, entraînera une diminution de sa force gravitationnelle suffisante pour que le niveau de l'océan l'entourant connaisse un retrait, donc une baisse importante de son niveau. Un tel effet réduirait ainsi considérablement la vitesse prévue du recul de la calotte glaciaire par la suite.

L’effet d’élasticité du manteau terrestre

L'Ouest de l'Antarctique repose sur une région où le manteau terrestre se déplace plus librement qu'ailleurs, suite à une viscosité moindre. La professeure Gomez et les deux autres auteurs de l’étude, David Pollard, de l’Université d'État de Pennsylvanie, et David Holland, de l’Université de New York, signalent que lorsqu'une calotte glaciaire recule, la partie terrestre sous-jacente, libérée du poids de la glace, se déplace vers le haut. Cela en deux phases, tout d'abord un rebond élastique immédiat, puis une remontée beaucoup plus lente liée à la viscosité de la Terre pouvant prendre quelques centaines, ou milliers d'années.

"Nos simulations montrent qu’en utilisant une structure terrestre similaire à celle qui se trouve sous l’ouest de l’Antarctique, la surface s’élève davantage et rebondit plus rapidement près du bord de la calotte glaciaire qui recule. L’eau qui se trouve au bord de la calotte est donc moins profonde, ce qui réduit la vitesse à laquelle la glace recule", explique le professeur Holland.

Jean Etienne

Source principale :

Sea-level feedback lowers projections of future Antarctic Ice-Sheet mass loss (Nature).

 

 

 
Topographie du substrat rocheux de l'Antarctique, essentielle pour comprendre le mouvement dynamique des calottes glaciaires continentales. Crédit : Centre spatial Goddard / Nasa. Cliquez sur l'image pour l'agrandir.
 

 

 
 
 

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