19 novembre 2015

 

La destruction d'un système solaire observée en direct

 
A 570 millions d'années-lumière, un corps rocheux de grande taille se désagrège et plonge dans la fournaise de son étoile, provoquant des éclipses en cascade.

"C'est tout simplement incroyable et personne n'avait encore observé ce phénomène à ce jour", déclare Andrew Vanderburg, chercheur au Harvard-Smithsonian Center for Astrophysics (CFA) aux États-Unis. "Nous assistons à la destruction d'un système solaire en direct", ajoute Patrick Dufour, professeur au Département de physique de l'Université de Montréal et chercheur à l'Institut de recherche sur les exoplanètes (iREx).

Ce sont les étranges variations de luminosité de la naine blanche WD 1145+017, dans la constellation de la Vierge, qui ont intrigué l'équipe d'astrophysiciens. Grâce aux données du télescope spatial Kepler, spécialisé dans la détection d'exoplanètes par la méthode du transit, les scientifiques pu mettre en évidence la présence de plusieurs corps célestes rocheux. Ceux-ci sont vraisemblablement les fragments d'un astéroïde tournant autour de l'étoile et en train de se disloquer à une distance de 800.000 kilomètres, soit deux fois seulement la distance de la Terre à la Lune, éclipsant son éclat toutes les quatre heures et demie.

Faisant appel à un nombre important de télescopes terrestres dont ils ont combiné les données, les chercheurs ont détecté les signatures d'autres fragments de cet astéroïde, qui transitent tous devant le disque de l'étoile dans les mêmes intervalles de temps. Ces éclipses se distinguent par la forte atténuation de la lumière de la naine blanche, qui atteint 40 %, un taux exceptionnel. De plus, l'examen de la courbe de luminosité lors de ces éclipses indique que l'objet pourrait ressembler à une comète. Combinés, ces deux résultats laissent supposer la présence d'un important nuage de poussière accompagnant les fragments de l'astéroïde, dont la masse avoisinerait celle de Cérès, le plus important de notre propre Système solaire, dont le diamètre est de l'ordre de 1000 kilomètres.

Les travaux de modélisation du professeur Dufour sur WD 1145+017 ont également permis de déterminer la composition chimique de la poussière d'astéroïde qui se dépose à la surface de l'étoile. "C'est très analogue à la Terre. L'étude de tels objets pourra nous en apprendre beaucoup sur la formation et la composition de planètes rocheuses autour d'autres étoiles", annonce le chercheur.

La découverte confirme aussi une théorie de longue date sur les sources de pollution des atmosphères de naines blanches par des métaux. Ceux-ci ne proviennent pas de leur cœur, mais plutôt de la présence d'une multitude de corps rocheux, qui perdent à chaque rotation autour de l'orbite de l'étoile une partie de leur poussière, ainsi que du disque de débris alors en orbite. "Il existe maintenant un lien direct entre la pollution de l'atmosphère des naines blanches par des métaux et l'évolution et la destruction des planètes mineures telluriques", conclut Andrew Vanderburg.

Jean Etienne

Source principale : A disintegrating minor planet transiting a white dwarf (Nature).

 

 

 
Modélisation du disque de poussières et de débris entraînés dans l'orbite de l'astéroïde. Crédit : Nature.
 

 

 
 
 

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