26 septembre 2015

 

Sixième Extinction de masse : 7% des espèces probablement déjà disparues

 
Ce ne serait pas 1,3% mais 7% de la biodiversité terrestre qui aurait déjà disparu, soit plus de 130.000 sur les deux millions d'espèces actuellement connues.

Quels chiffres fondent la notion de 6ème extinction de masse ? La Liste rouge de l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) dresse chaque année la liste "officielle" des espèces éteintes ou en danger d’extinction. Elle recense environ 1000 espèces de plantes et d'animaux, éteintes au cours des quatre derniers siècles alors que dans le même temps les biologistes découvrent et décrivent en moyenne 18.000 nouvelles espèces par an, qui s'ajoutent aux deux millions déjà connues.

Ce décalage entre les 1000 espèces recensées par l’UICN et les millions d’espèces existantes s’explique aisément. La mesure de la crise se base essentiellement sur les vertébrés supérieurs (oiseaux, mammifères), pour lesquels nous disposons de données robustes mais qui concentrent aussi l'essentiel des efforts de conservation.

Lorsque la Liste rouge recense "seulement" 1,3% d'extinctions chez les mammifères et les oiseaux, ce chiffre reflète, certes, la crise de la biodiversité (ce chiffre est en effet 100 à 200 fois supérieur au "bruit de fond" constitué de l'extinction naturelle), mais il reflète aussi le succès des actions de conservation : création de réserves et aires protégées, plans de reproduction en captivité dont bénéficient la plupart des oiseaux et bon nombre de mammifères.

Les invertébrés, au contraire, constituent le plus gros bataillon de la biodiversité (70% des espèces connues, la plupart petites et rares, difficiles à échantillonner et à identifier), mais souffrent à la fois d'un déficit de connaissances et d'un déficit d'attention en termes de stratégies de conservation.

Une nouvelle approche de la crise de la biodiversité fondée sur les invertébrés

Face à ce constat, une équipe de chercheurs pluridisciplinaires français, notamment de l’Institut de Systématique, Évolution et Biodiversité (Muséum national d’Histoire naturelle/CNRS/UPMC/EPHE), du Centre des sciences de la conservation (Muséum national d’Histoire naturelle/CNRS/UPMC) et de l’université d’Hawaï, a remis en question les données sur lesquelles s’appuie la mesure de la Sixième Extinction en s’intéressant spécifiquement aux invertébrés.

Ils ont jeté leur dévolu sur un groupe d'invertébrés considéré comme représentatif : les mollusques terrestres, tels les escargots et les limaces. Les espèces qui les constituent étant extrêmement nombreuses, 200 d'entre elles ont été tirées au sort, et les scientifiques ont interrogé 35 experts répartis dans le monde entier afin de déterminer si elles étaient éteintes, encore présentes ou s'ils ne pouvaient se prononcer.

En parallèle, toutes les informations existantes depuis deux siècles sur ces 200 espèces ont été rassemblées : données bibliographiques, mais aussi données issues de collections de plusieurs Muséums d’histoire naturelle, données d’amateurs et de collectionneurs, habituellement non utilisées pour construire ce genre de scénarii.

Ces données ont alimenté un modèle de mathématique probabiliste pour mesurer les "chances" d'extinction de chacune des espèces. Les résultats des deux approches, avis d’expert et modèle mathématique, totalement indépendants, sont remarquablement concordants. Extrapolés aux autres compartiments de la biodiversité, ces résultats permettent donc d’estimer que nous aurions déjà perdu, non pas 1,3 mais… 7% de la biodiversité terrestre de la planète.

Selon Claire Régnier, du muséum d’histoire naturelle de Paris, les premières estimations avaient été largement sous-évaluées car les chercheurs avaient négligé de prendre les invertébrés en compte. "C’est très paradoxal. Les invertébrés représentent 99% de la biodiversité et les mammifères seulement 1%. Pourtant, pour un chercheur qui travaille sur les invertébrés, 100 travaillent sur les vertébrés. Cela explique pourquoi la catégorie des mollusques est si mal connue", annonce la scientifique.

Source principale :

Mass extinction in poorly known taxa (Proceedings of the National Academy of Science - PNAS).
 
 

 
La répartition territoriale de Tyrrhenaria ceratina, l'escargot de Corse, se limite aujourd'hui à une étroite bande côtière de 6 hectares environ, en retrait de la plage du Ricantu au sud-est d'Ajaccio. Elle fait partie des espèces en danger critique d'extinction.
 

 

 
 
 

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