4 mars 2016

 

Première découverte de sursauts radio rapides en série

 
D'étranges sursauts radio émis en série depuis une source extragalactique laisse présager l'existence d'un nouveau type de radiosource.

Les astronomes connaissaient déjà les SRR, ou sursauts radio rapides, qui se traduisent sous la forme de multiples sursauts se produisant généralement en moins d'une minute. Mais jusqu'à présent, toutes les émissions de ce type semblaient être des phénomènes ponctuels, et c'est pourquoi toutes les théories émises pour tenter de les expliquer reposaient sur des évènements cataclysmiques se soldant par la destruction de la source, comme par exemple une étoile se transformant en supernova ou une étoile à neutrons s'effondrant sur elle-même en devenant un trou noir. Mais la récente observation montre que les SSR, ou certains d'entre eux, ne répondent pas à cette hypothèse.

Tout commence le 5 novembre 2015, lorsque Pierre Scholz, doctorant à l'Université Mc Gill, examinant les résultats d'observation effectuées au moyen du radiotélescope de 305 mètres d'Arecibo (Porto-Rico) en les soumettant à un des superordinateurs du Centre informatique de haute performance de l'Université, constata l'existence de SRR détectés en mai et juin 2015, donc les propriétés concordaient avec celles d'un premier SRR décelé en 2012.

La découverte était réellement surprenante… et impossible, si l'on se réfère à toutes les hypothèses émises jusqu'alors, qui prévoyaient la destruction de la source d'émission des SRR, empêchant ainsi leur répétition. Et alors que tous les collègues du chercheur, alertés, se pressaient autour de l'écran d'ordinateur pour examiner ces résultats, Pierre Scholz passait au crible les dernières données au moyen d'un logiciel conçu pour la recherche de pulsars et sursauts radio. Et découvrait pas moins de 10 nouvelles émissions de SSR également concordantes !

Une source de nature inconnue

"Non seulement ces sursauts se répétaient, mais leur brillance et leur spectre différaient de ceux d’autres SRR", précise Laura Spitler, auteure principale de la publication et chercheuse postdoctorale à l’Institut de radioastronomie Max Planck, à Bonn, en Allemagne. Ces observations indiquent que ces séries de sursauts sont émises par un objet très inhabituel, comme une étoile à neutrons en rotation rapide d'une puissance encore jamais observée, tout comme il peut s'agir d'une nouvelle sous-classe de SSR d'origine extragalactique.

A quelle distance se situent ces sources ? Un premier indice a été fourni par l'étude de ce que les chercheurs nomment l'effet de "dispersion dans le plasma", basé sur le fait que les ondes électromagnétiques de fréquences différentes ne se propagent pas exactement à la même vitesse. En effet, celles-ci sont ralenties en présence d'électrons interstellaires et les impulsions qui se propagent dans le cosmos se distinguent des émissions d'origine humaine, avec une différence d'autant plus marquée que la source est lointaine. Or, le facteur de dispersion des dix sursauts, tout comme de celui découvert en 2012, est trois fois plus élevé que celui auquel on pourrait s'attendre d'une source située dans notre galaxie.

Une galaxie à localiser

Reste à présent à l'équipe de scientifiques à localiser la galaxie abritant la source des SRR observés. Pour cela, il sera fait appel à l'interférométrie, une technique reposant sur un réseau de radiotélescopes reliés entre eux sur un vaste territoire géographique, autorisant la résolution nécessaire.

"Lorsque nous aurons déterminé la position exacte des sursauts successifs dans le ciel, nous pourrons comparer les données obtenues à l’aide de télescopes optiques et de télescopes à rayons x et ainsi savoir s’il existe une galaxie à cet endroit", explique Jason Hessels, professeur agrégé à l’Université d’Amsterdam et à l’Institut de radioastronomie des Pays-Bas, et auteur-ressource de l’article publié dans la revue Nature. "Il est essentiel que nous puissions découvrir la galaxie hôte de cette source si nous voulons comprendre ses propriétés", ajoute-t-il.

Jean Etienne

Source principale :

A Repeating Fast Radio Burst (Nature, 2 mars 2016 - DOI : 10.1038/nature17168).

 

 

 
L'immense radiotélescope d'Arecibo, dont l'antenne mesure 305 mètres de diamètre, est le premier appareil à avoir détecté une succession de sursauts (SRR) provenant d’une même source.
 

 

 
 
 

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