10 mars 2016

 

L'âge des comètes révélé par leur type de glace

 
Les glaces composant la comète 67P/Churyumov-Gerasimenko existent essentiellement sous une forme cristalline, trahissant une même origine que la nébuleuse primitive ayant donné naissance à notre Système solaire.

Cette découverte a été permise par l'analyse des données transmises par l'instrument Rosina (Rosetta Orbiter Spectrometer for Ion and Neutral Analysis), situé à bord de la sonde Rosetta de l'Agence spatiale européenne, actuellement en orbite autour de la comète.

En effet, la mission Rosetta dévoile peu à peu les secrets des comètes et permet enfin de résoudre une question restée en suspens depuis plusieurs décennies, portant sur la nature des glaces qui les composent : s'agit-il de glace cristalline, où les molécules d'eau sont arrangées de manière périodique, ou de glace amorphe, où les molécules d'eau sont désordonnées ? Une question dont la réponse porte à conséquence sur l'origine et la formation du Système solaire en entier.

La réponse à cette question essentielle a été apportée par l'instrument Rosina, un spectromètre de masse installé à bord de la sonde. En octobre 2014, l'appareil a pu déterminer avec précision les abondances en diazote (N2), monoxyde de carbone (CO) et argon (Ar) dans la glace recouvrant 67P. Ces données ont ensuite été comparées à celles obtenues en laboratoire lors d'expériences sur de la glace amorphe, ainsi qu'à celles de modèles décrivant la composition d'hydrates de gaz, un type de glace cristalline où les molécules d'eau peuvent emprisonner des molécules de gaz.

Confirmation de la glace cristalline

Les taux de diazote et d'argon mesurés sur 67P correspondent parfaitement aux modèles d'hydrates de gaz entrant dans la composition de glaces cristallines, tandis que la quantité d'argon déterminée sur la comète est 100 fois inférieure à celle que la glace amorphe pourrait piéger. La glace de 67P est donc bien de structure cristalline.

Ces mesures permettent de dater l'âge des comètes, car les hydrates de gaz sont des glaces cristallines qui n'ont pu se former qu'au sein de la nébuleuse primitive à l'origine du Système solaire, à partir de la cristallisation de grains de glace d'eau et de l'adsorption de molécules de gaz sur leurs surfaces au cours du lent refroidissement de la nébuleuse.

Et si les comètes sont composées de cette glace cristalline, cela implique une formation contemporaine du Système solaire, et non antérieure dans le milieu interstellaire comme cela avait été autrefois suggéré parmi d'autres théories. Cette structure cristalline démontre aussi que la température de la nébuleuse primitive était suffisamment élevée pour sublimer la glace amorphe provenant du milieu interstellaire.

Ainsi, les modèles actuels impliquent que les hydrates de gaz agglomérés par 67P ont dû se former entre -228 et -223°C pour produire les abondances mises en évidence par l'instrument Rosina. Les mêmes travaux confortent également les scénarios de formation des planètes géantes ainsi que de leurs satellites, qui nécessitent aussi l'agglomération de glaces cristallines.

Cette recherche a été effectuée par une équipe internationale de chercheurs conduite par le professeur d'Astrophysique Olivier Mousis, membre du CNRS et du Laboratoire d'Astrophysique de Marseille (LAM), ainsi que d'autres scientifiques cités dans le lien donné ci-dessous.

Jean Etienne

Source principale :

A protosolar nebula origin for the ices agglomerated by 67P/Churyumov-Gerasimenko (The Astrophysical Journal Letters, 8 Mars 2016 – DOI : dx.doi.org/10.3847/2041-8205/819/2/L33).

 

 

 
La comète 67P/Churyumov-Gerasimenko vue depuis la sonde européenne Rosetta le 31 janvier 2015.
Crédit : ESA.
 

 

 
 
 

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