11 avril 2016

 

Deuxième récupération réussie d'un lanceur Falcon 9

 
Après avoir réussi à récupérer intact un premier étage de son lanceur Falcon 9 en décembre dernier, la société SpaceX renouvelle son exploit, cette fois sur une barge positionnée en pleine mer.

Les techniciens de la société fondée en 2002 par le milliardaire Elon Musk (aussi co-fondateur de PayPal et de TeslaMotors) peuvent être fiers. Car non seulement, ce 8 avril 2016, la fusée Falcon 9 réussissait à placer le vaisseau de ravitaillement Dragon en orbite, lequel s'est arrimé deux jours plus tard à la Station Spatiale Internationale, mais le premier étage de la fusée a réussi son retour en se posant en douceur sur une barge flottante positionnée dans l'océan.

Lanceur moyen capable de placer 10,5 tonnes en orbite basse, Falcon 9 est une fusée de 55 mètres de hauteur pour un diamètre de 3,6 mètres (hors coiffe) d'une masse de 333 tonnes au décollage. Son premier étage est propulsé par un ensemble de 9 moteurs Merlin fonctionnant à l'oxygène liquide et RP-1 (Rocket Propellant 1 ou Refined Petroleum 1), une forme de kérosène spécialement raffiné en vue d'une utilisation comme carburant liquide stockable, moins performant que l'hydrogène liquide, mais bien plus facile à manipuler. Ces 9 moteurs fournissent une poussée cumulée de 448,9 tonnes. Le second étage est équipé d'un seul moteur Dragon, modifié afin d'obtenir un fonctionnement optimal dans le vide et assurant une poussée de 52,3 tonnes.
 

Le vaisseau de ravitaillement Dragon en cours d'arrimage à la Station Spatiale Internationale.

Le vaisseau Dragon, quant à lui, est capable de transporter 6 tonnes en orbite basse et plus de 3 tonnes jusqu'à la station spatiale. Il comporte unepartie pressurisée d'une contenance de 10 m³, et une partie non pressurisée qui dispose également d'une capacité cargo de 14 m³. Une écoutille et une pièce d'arrimage lui permettent de s'amarrer à la station spatiale internationale.

Dans sa version récupérable, la séparation du premier étage du lanceur intervient légèrement plus tôt que dans le modèle classique, afin de conserver suffisamment d'ergols pour freiner lors d'une descente contrôlée. Les moteurs de contrôle d'attitude entrent alors en action afin de modifier l'assiette de l'engin alors qu'il poursuit sa course sur une trajectoire balistique, puis chute librement vers le sol. Deux minutes plus tard, trois des neuf moteurs sont remis en marche durant 30 secondes et commencent à ralentir l'étage en le dirigeant vers son point de destination. Encore deux minutes plus tard, des grilles de stabilisation entrent en fonction, agissant comme des freins aérodynamiques et les moteurs sont de nouveau rallumés afin de réduire la vitesse. Enfin, 30 secondes avant l'atterrissage, un seul des moteurs est remis à feu, avec une poussée fortement modulée de façon à prendre contact avec le sol à vitesse nulle tout en garantissant une verticalité parfaire de l'ensemble. Le train d'atterrissage se déploie automatiquement six secondes avant la prise de contact.

Pour la première fois cependant, cette récupération s'est effectuée non sur le sol ferme, comme le 22 décembre dernier, mais sur une barge positionnée en mer, ce qui augmentait la difficulté. Avec une précision redoutable, l'étage de fusée s'est délicatement posé, parfaitement à la verticale, à moins de deux mètres du centre de la "cible".

Cinq tentatives réelles, deux réussites
 
10 janvier 2015 Sur barge Echec : le lanceur se présente sous un mauvais angle et bascule.
11 février 2015 Sur barge Le mauvais temps fait abandonner la tentative de récupération.
14 avril 2015 Sur barge Echec : une trop grande vitesse d'approche provoque la rupture du train d'atterrissage et l'explosion.
22 décembre 2015 Au sol Le premier étage se pose avec succès.
17 janvier 2016 Sur barge Echec : la rupture d'une jambe d'atterrissage provoque le basculement de l'engin, qui explose.
4 mars 2016 Sur barge La charge satellisable ayant entraîné une trop grande consommation de carburant, l'étage ne peut freiner suffisamment et s'écrase, ce qui était d'ailleurs prévu et n'est donc pas considéré comme un échec.
8 avril 2016 Sur barge Le premier étage se pose avec succès.
 
On voit que sur sept tentatives effectuées jusqu'à présent, une n'a pu être menée à bien suite à des conditions météorologiques défavorables (11 février 2015), et une autre n'a pu se réaliser suite à une carence en carburant consécutive à une charge utile trop lourde. Dans ce dernier cas, les techniciens avaient tout de même programmé une trajectoire de retour, en restant conscients que l'appareil ne pourrait se poser en douceur, ce qui n'est donc pas ressenti comme un échec. On peut donc considérer que deux tentatives réussies sur les cinq restantes ont été couronnées de succès, ce qui constitue un véritable exploit pour une technologie aussi complexe au stade de l'expérimentation.

Un immense espoir en voie de concrétisation

L'objectif de SpaceX est de rendre ses lanceurs réutilisables, réduisant ainsi le coût des vols spatiaux. Une des objections à ce projet serait que la récupération d'un étage de fusée entraîne obligatoirement une augmentation de la quantité d'ergols nécessaires afin de réduire la vitesse lors de la trajectoire de retour, réduisant ainsi le rapport carburant/charge utile. Ce à quoi Elon Musk répond que dans la majorité des cas, les fusées traditionnelles sont rarement utilisées à leur charge maximale, ce qui offre presque toujours une marge exploitable permettant un tel emport. Et que de fait, sur les sept dernières missions de Falcon 9, une seule, le 4 mars dernier, n'offrait pas cette possibilité.

Toujours selon Elon Musk, l'étage de Falcon 9 récupéré le 8 avril reprendra le chemin de l'espace dès le mois de juin prochain, et pourrait être réutilisé jusqu'à 20 fois.

Jean Etienne

Vidéo du lancement et de la récupération du 8 avril 2016.
Revoir l'intégralité du vol, jusqu'à la satellisation (18 minutes).

 

 

 
Le premier étage du lanceur Falcon 9 vient de se poser sur la barge. Crédit : SpaceX.
 

 

 
 
 

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