26 avril 2016

 

Une fusée Soyouz d'Arianespace place cinq satellites scientifiques en orbite

 
Une fusée Soyouz (vol VS 14) d'Arianespace a décollé ce lundi 25 avril 2016 à 21h03 TU, emmenant sous sa coiffe deux satellites scientifiques, Sentinel 1-B et Microscope, ainsi que trois nanosatellites CubeSat, dont le belge Oufti.

Sentinel 1-A avait été lancé le 3 avril 2014 à 21h02 depuis Kourou, et avait été conçu comme devant former une constellation de deux satellites. Ils sont équipés de radars à synthèse d'ouverture en haute résolution, capables d'observer la surface de la Terre à travers les nuages et la pluie, de jour comme de nuit. Les 180° qui séparent les deux satellites sur leur orbite permettent d'optimiser la couverture mondiale et la livraison des données dans le cadre du programme Copernicus. La mission dans son ensemble fournit des images radar pour une multitude de services et d'applications destinées à améliorer la vie au quotidien et à comprendre les modifications de notre planète.

 
 

 
Sentinel 1-B
 
Microscope

Au total, le vol VS 14 emporte cinq satellites dont il ne faut pas oublier Microscope (acronyme de Micro-satellite à traînée compensée pour l’observation du principe d’équivalence), concrétisation d'un programme scientifique du Cnes qui devrait permettre de tester "l’universalité de la chute libre".

Ce principe d'équivalence a été démontré expérimentalement pour la première fois par… Galilée, au 17ème siècle, lorsqu'il a laissé tomber du sommet de la Tour de Pise deux masses de nature et masse différentes, en constatant qu'elles arrivaient en même temps au sol. Il en déduisit que dans le vide, où l'air ne freine plus la chute, tous les objets tombent avec la même vitesse, quelle que soit leur masse ou leur composition. C’est ce qu’on appelle aujourd'hui l’universalité de la chute libre ou encore l’équivalence entre la masse pesante (sensible à l’attraction gravitationnelle) et la masse inerte (sensible au changement de mouvement). Cette observation sera érigée en principe, dit d’équivalence, par Albert Einstein qui en fera le fondement de sa théorie de la relativité générale.

Aujourd'hui, ce principe a été vérifié avec une précision de 10-13. Cependant, les physiciens souhaiteraient encore mieux. Pourquoi ? Tout simplement parce que de nouvelles théories, qui cherchent à concilier la gravitation avec les autres interactions fondamentales (nucléaire et électromagnétique), prédisent qu’il pourrait être violé à un niveau très faible, niveau se situant au-delà des résultats d'expériences effectuées sur Terre.

Et c'est là qu'intervient le satellite Microscope, qui permettra de tester ce principe d'équivalence avec une précision atteignant 10-15, c'est-à-dire cent fois meilleure ! Dans l'espace, il est en effet possible d'étudier le mouvement relatif de deux corps à bord d'un satellite, à l'abri des perturbations rencontrées sur Terre (notamment sismiques), et ce, durant plusieurs mois d'affilée.

Car la précision requise est redoutable. L' "âme" de Microscope est constituée de deux cylindres concentriques faits de matériaux différents, l'un d'un alliage platine-rhodium (extérieur), l'autre de titane (intérieur). Suspendus en apesanteur et sans le moindre contact avec quoi que ce soit, ceux-ci sont minutieusement contrôlés afin de les maintenir immobiles par rapport au satellite, à l'intérieur d'accéléromètres électrostatiques différentiels indépendants. Le déplacement des cylindres sera mesuré avec une précision équivalent au diamètre d'un atome.
 
 

 
Schéma de principe du coeur de Microscope, montrant les deux cylindres emboîtés. En rouge, en platine-rhodium, en vert, en titane. Les senseurs qui les entourent sont capables de détecter un déplacement de la valeur du diamètre d'un atome. Crédit : CNES.
 
Selon le principe d'équivalence, les deux masses devraient obéir identiquement à différentes accélérations. Dans le cas contraire, le principe serait violé, un évènement qui ébranlerait lourdement les fondements mêmes de la physique.

Trois CubeSats, dont Oufti-1 !

Trois satellites scientifiques Cubesats profitent de ce lancement Soyouz pour partir dans l'espace. Ces petits satellites, un danois, un italien et un belge, mesurant chacun seulement 10×10×11 cm, ont été développés par des équipes d'étudiants universitaires via le programme "Fly Your Satellite! de l'ESA.

Parmi eux, Oufti-1, constitué d'un cube de 10 cm de côté pour une masse de 1 kg, a été conçu principalement par des étudiants de l’Université de Liège et de hautes écoles liégeoises (Belgique). Plus qu’un instrument pédagogique, «Oufti-1» aura bien entendu une utilité, une fois en orbite autour de la Terre. Son appellation fait bien référence à la fameuse exclamation liégeoise (Ouf, toi !, Ndlr). Il s’agit aussi d’un acronyme : Orbital Utility For Telecommunication Innovation.

La nano-satellite servira en quelque sorte de relais dans l’espace, puisqu’il emmènera avec lui pour la première fois la technologie D-Star, un protocole de communication pour la voix et les données développé par l'association des radioamateurs japonais (JARL) pour expérimenter les technologies numériques dans le cadre du radioamateurisme. La présence d’un tel relais dans l’espace permettra de pratiquer l’activité radio y compris pour des personnes éloignées d’un relais sur terre ou d’une connexion internet, dans des zones isolées ou par exemple touchées par des catastrophes naturelles. En plus des liaisons radio, Oufti-1 permettra encore de tester dans l’espace les cellules solaires dont il est équipé, dont le rendement est plus élevé que celles des panneaux photovoltaïques. La durée de vie prévue du satellite est d'environ 2 ans.

Jean Etienne

 
 

 
Microscope. Crédit : CNES.
 

 

 
 
 

Retour

Commentez cet article dans le forum