21 septembre 2016

 

Ce que l'aviation doit encore apprendre des oiseaux

 
Une étude de l’ICTP (International Centre for Theoretical Physics) de Trieste révèle les secrets du vol de ces extraordinaires voyageurs en simulant leur stratégie de navigation dans des flux d’air turbulents. Les planeurs du futur pourraient s’en inspirer.

Comme le démontrent les oiseaux migrateurs et les pilotes de planeurs, exploiter le soulèvement de masses d’air suite à leur réchauffement représente une stratégie fondamentale pour augmenter la portée du vol et minimiser le coût énergétique. Grâce à une étude récente basée sur des simulations du flux atmosphérique et de l’aérodynamique du vol, les chercheurs ont réussi à ramener ce processus complexe à de simples modèles de comportement animal dans lesquels un nombre limité d’informations suffit pour réussir à rester en vol sans se poser pendant des semaines.

La recherche a permis d’identifier les stratégies de navigation les plus efficaces dans des flux d’air turbulents, situation typique des courants ascensionnels. Elle est le fruit d’une collaboration entre Antonio Celani, chercheur de l'ICTP, le Département de Physique de l’Université de Californie de San Diego (UCSD) et le Salk Institute for Biological Studies.

Et tout cela sans instruments de navigation…

Les oiseaux migrateurs sont capables d’identifier les courants thermiques et de s’y déplacer avec une précision supérieure à celle des humains et les informations qui leur sont disponibles pour ce faire est une question ouverte. Un aspect crucial pour voler efficacement est d’identifier un courant ascensionnel et de maintenir le vol en son centre, où le soulèvement est majeur. Quand les oiseaux migrateurs atteignent la cime du courant, ils planent ensuite en direction du courant suivant et répètent le processus. Ces courants atmosphériques étant invisibles, il est a priori complexe d’en évaluer le potentiel d’ascension.

Pour comprendre comment les oiseaux réussissent si bien à maitriser ce processus de vol, les chercheurs ont essayé d’identifier les informations locales nécessaires, comme la température et la vitesse du vent, pour trouver et exploiter les courants. De plus, étant donné que les oiseaux n’ont pas les instruments pour prévoir l’évolution des dynamiques atmosphériques, les scientifiques ont évalué la possibilité qu’ils puissent "apprendre" à voler dans les courants. Ils ont pour cela mis au point des algorithmes afin de simuler les trajectoires ascendantes et descendantes des oiseaux, et voir s'il était possible d'élaborer une stratégie de vol basée sur la répétition des tentatives et des erreurs, que l'on nomme "apprentissage par renforcement".

Un mécanisme d'apprentissage d'une simplicité déconcertante

"Nous avons réalisé des simulations numériques de la couche limite de l’atmosphère qui présente une séquence irrégulière de courants thermiques ascendants et descendants sur un fond de fortes fluctuations de vitesse," explique Celani. "Successivement, nous avons conçu notre algorithme d’apprentissage pour identifier les combinaisons de paramètres nécessaires pour obtenir le meilleur résultat en terme d’efficacité de vol. De façon surprenante, seuls deux types d’information se sont révélés nécessaires : l’accélération verticale du courant et le moment mécanique, c’est à dire la capacité du courant à donner un mouvement de rotation à l’oiseau", explique le chercheur. "Après des centaines d’essais, en encourageant les bons choix et en pénalisant les mauvais, les simulations d’oiseaux ont appris à trouver le courant thermique successif avec un taux de réussite très élevé."

Pour confirmer et approfondir ces résultats théoriques, les chercheurs sont actuellement occupés à réaliser des expériences en utilisant divers modèles de planeurs radiocommandés, en utilisant la stratégie mise en évidence par leurs observations. Compte tenu du potentiel commercial des véhicules aériens sans pilote, les études théoriques sur ces systèmes à basse consommation d’énergie pourraient avoir des impacts importants.

Jean Etienne

Sources principales :

How birds soar to great heights (University of California - San Diego - Proceedings of the National Academy of Sciences, 2016; DOI: 10.1073/pnas.1606075113).

Gli uccelli migratori ispirano gli alianti del futuro (Galileo, 13 septembre 2016).
 

 

 
Cette superbe Frégate de Nouvelle-Zélande est capable d'atteindre l'altitude de 2500 mètres en utilisant les courants ascendants et sans battre des ailes, avant de revenir au niveau de la mer. (Commons).
 

 

 
 
 

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