21 mars 2017

 

Nouveau recul de la date d'apparition de la vie sur Terre

 
Jusqu'où reculera l'estimation de la date d'apparition de la vie sur notre planète ? Jusqu'ici évaluée à 3,460 milliards d'années, une nouvelle découverte vient de la faire reculer à 3,770 milliards d'années, soit seulement 530 millions d'années après la formation de la Terre. Une telle précocité semblerait indiquer que la vie apparaît dès que des conditions favorables à son développement sont réunies.

Une équipe de chercheurs conduite par Matthew S. Dodd, premier auteur de l’étude et étudiant PhD à l’UCL Earth Sciences and the London Centre for Nanotechnology, a découvert des microfossiles formés de tubes et d'incrustations produits par une bactérie, encastrés dans des couches de quartz de la ceinture supracrustale du Nuvvuagittuq (NSB) au Québec, datant de 3,770 milliards d'années.

La NSB contient les plus anciennes roches sédimentaires connues sur Terre. Elles se sont formées sur une cheminée hydrothermale riche en fer qui a fourni un habitat pour la première forme de vie connue sur Terre. Cette découverte soutient l’idée que la vie a émergé des cheminées hydrothermales rapidement après que la Terre se soit formée. Une apparition très précoce de la vie sur notre planète, qui corrobore d’autres preuves provenant de monticules sédimentaires qui ont pu être formés par des micro-organismes selon Matthew Dodd.

Avant cette découverte, les plus vieux microfossiles avaient été découverts dans l’ouest de l’Australie et ne dataient "que" de 3,460 milliards d’années. Cependant, certains scientifiques avançaient qu'il ne s'agissait que d'artefacts formés par hasard dans les roches. La démonstration de l'origine biologique des microfossiles canadiens revêt donc une importance capitale.

Les scientifiques se sont donc attelés à déterminer et analyser toutes les causes non biologiques possibles ayant pu former ces filaments et ces tubes, qui sont composés d'hématite. Mais toutes ces causes non biologiques ont été écartées une à une, et les structures découvertes présentent les mêmes caractéristiques que les bactéries d’oxydation du fer qu’on trouve aujourd’hui dans les cheminées hydrothermales. De plus, ces fossiles ont été trouvés à côté de graphite et de minéraux comme l’apatite et le carbonate qu’on retrouve dans la matière biologique incluant les os et les dents, et qui sont fréquemment associés aux fossiles.

Les chercheurs ont également trouvé que les fossiles minéralisés sont associés avec des structures sphéroïdales qui contiennent habituellement des fossiles dans les roches jeunes. Cela suggère que l’hématite se serait formée lorsque la bactérie qui oxydait le fer pour collecter l’énergie a été fossilisée dans la roche.

"Nous avons trouvé les filaments et les tubes dans des structures de la taille du centimètre qu’on connait comme les nodules ainsi que d’autres structures sphéroïdales appelées rosettes et granules, et nous pensons que ces structures sont le résultat de la putréfaction. Ces structures sont identiques sur le plan minéral à ceux qu’on trouve dans les roches jeunes en Norvège, dans les régions des Grands Lacs en Amérique du Nord et dans l’ouest de l’Australie", explique le Dr Dominic Papineau, un des principaux auteurs de l’étude.

"Ces structures sont composées de minéraux qui se forment à partir de la putréfaction, un type bien documenté dans l’histoire géologique. Le fait que nous ayons découvert l’une des plus anciennes formations rocheuses de la Terre suggère que nous avons aussi trouvé une preuve directe de la plus ancienne forme de vie. Cette découverte nous permet de retracer l’histoire de notre planète et le développement de la vie et elle nous aidera à identifier des traces de vie sur d’autres planètes", ajoute le chercheur.

Matthew Dodd conclut que ces découvertes démontrent que la vie s’est développée très rapidement sur Terre à l’époque où non seulement notre planète, mais aussi Mars maintenaient de l'eau à l'état liquide à leur surface. Car même si les océans martiens n'ont pu se maintenir pour différentes raisons, l'espoir de découvrir sur la Planète Rouge une trace de vie fossile est plus que jamais d'actualité et son absence ferait de la Terre une exception difficile à expliquer, peut-être plus encore que l'apparition même de la vie.

Jean Etienne

Sources principales :

4 billion years: World's oldest fossils unearthed (Phys.org, 1er mars 2017).
Evidence for early life in Earth's oldest hydrothermal vent precipitates (Nature, 1er mars 2017 – doi: 10.1038/nature21377).
 

 

 
Des tubes d'hématite des cheminées hydrothermales au NSN qui représentent les plus anciens micro-fossiles découverts sur Terre. Ces restes datent de 3,770 milliards d'années. Crédit : Matthew Dodd.
 
 
 

 
Filament d'hématite attaché à une touffe de fer en bas à droite, provenant de dépôts de cheminées hydrothermales dans la Ceinture supracrustale Nuvvuagittuq au Québec. Ces amas de fer et les filaments sont produits par des cellules microbiennes et sont semblables aux microbes modernes trouvés dans des environnements plus contemporains. Crédit : Matthew Dodd.
 

 

 
 
 

Retour

Commentez cet article dans le forum