30 mai 2018

 

Le menu des dinosaures révélé par le calcium

 
Il y a une centaine de millions d'années, les écosystèmes terrestres d'Afrique du Nord étaient dominés par de grands prédateurs géants, avec en proportion très peu d'herbivores. Ce qui soulevait un problème : comment autant de carnassiers pouvaient-ils cohabiter ?

Une équipe de chercheurs conduite lar le Dr. Auguste Hassler, de l'Université Claude Bernard de Lyon 1, a étudié les fossiles des dépôts de Gadoufaoua au Niger (datés de 120 millions d'années) et de la formation des Kem-Kem au Maroc (100 millions d'années), dont la particularité est de présenter une nette surabondance de grands prédateurs, comme les dinosaures théropodes géants, et de grands crocodiles, aux côtés de très peu d'herbivores.

En particulier, l'accent a été mis sur les proportions des différents isotopes du calcium dans les restes fossilisés, les dents et les écailles de poissons essentiellement. Ce calcium est en effet un indice extrêmement fiable du régime alimentaire, car chez les vertébrés, celui-ci provient quasi-exclusivement de l'alimentation. Et comparer la composition isotopique des proies potentielles (poissons, herbivores…) à celles des dents de carnivores permet ainsi de remonter au régime de ces derniers.

Les préférences alimentaires des individus analysés dans les deux gisements sont nettement similaires. Les grands dinosaures carnassiers (abélisauridés et carcharodontosauridés) se nourrissaient essentiellement de proies terrestres, comme des dinosaures herbivores, tandis que les spinosaures étaient herbivores. Par contre, le régime du crocodile géant Sarcosuchus était mixte, à la fois composé de proies terrestres et aquatiques. L'évolution a donc conduit ces prédateurs vers un partage subtil des ressources alimentaires, leur évitant une compétition qui aurait pu leur être fatale.

Par le passé, certains fossiles considérés comme exceptionnels, qui présentaient des traces de morsures ou un contenu stomacal préservé, avaient déjà orienté les chercheurs à la recherche de leur type d'alimentation, mais ils restaient rares. L'avantage de l'étude par comparaison des différents isotopes du calcium est de produire un panorama global des habitudes alimentaires à l'échelle de tout l'écosystème, et ouvre ainsi des perspectives nouvelles pour l'étude des chaînes alimentaires de cette époque lointaine.

Jean Etienne

Sources principales :

Supplementary material from "Calcium isotopes offer clues on resource partitioning among Cretaceous predatory dinosaurs", Figshare, 9 avril 2018.

Calcium isotopes offer clues on resource partitioning among Cretaceous predatory dinosaurs, Proceedings of the Royal Society, Biological Sciences, 11 avril 2018.
 

 
 
De gauche à droite: des dents d'un crocodile géant Sarcosuchus imperator, d'un spinosaure, d'un théropode non spinosaure, d'un ptérosaure, d'un ouranosaure (dinosaure herbivore), d'un pycnodonte ( poisson) et d'un petit crocodilomorphe. La barre représente 2 cm. Crédit : Auguste Hassler / LGL-TPE / CNRS-ENS de Lyon-Université Lyon 1. Cliquer sur l'image pour agrandir.
 

 

 
 
 

Retour

Commentez cet article dans le forum