31 janvier 2019

 

MaNGA, un nouveau regard sur les galaxies

 
Avec le programme MaNGA, l'Université de Californie - Santa Cruz dispose à présent d'un nouveau moyen d'observation des galaxies, permettant d'en disséquer la composition interne, ainsi que les mouvements individuels de ses étoiles et de son gaz, et d'en retracer l'histoire. Mais pas que…

La spectroscopie est un outil puissant permettant aux astronomes d'obtenir des renseignements précieux sur la composition d'une galaxie. Mais le spectrographe ne fournissait généralement qu'un seul spectre pour toute une galaxie, constituant, en gros, la composition moyenne des objets qu'elle comporte. MaNGA pour Mapping Nearby Galaxies at Apache Point Observatory, applique une nouvelle technique de spectrographie résolue (resolved spectroscopy), pour étudier les galaxies de manière beaucoup plus détaillée que les sondages précédents, en permettant d'obtenir des centaines de spectres distincts convrant chaque emplacement de la galaxie.

"La spectroscopie résolue nous permet de disséquer une galaxie et d'étudier sa composition interne ainsi que les mouvements de ses étoiles et de son gaz", explique Kevin Bundy, chercheur principal de MaNGA, chercheur associé aux observatoires de l'Université de Californie et professeur auxiliaire d'astronomie et d'astrophysique à l'Université de Californie Santa Cruz. "Jusqu'ici nous utilisions la spectroscopie résolue pour des galaxies individuelles, mais à présent nous l'appliquons pour des milliers de galaxies, avec la possibilité statistique de traiter beaucoup de questions importantes", ajoute Bundy.
 

 

 
Chaque galaxie peut être isolée, et chacun de ses points ciblé séparément afin d'en obtenir des spectres séparés permettant d'en dresser la distribution de ses éléments et les mouvements internes. L'ensemble de données MaNGA comprendra à terme plus de 10.000 galaxies, et le sondage a déjà dépassé la moitié de son objectif.
Cliquer sur l'image pour en obtenir la vision complète. Crédit : Collaboration SDSS / MaNGA.
 

La dernière publication de données du Sloan Digital Sky Survey (SDSS) inclut des observations révélant la structure interne et la composition de près de 5000 galaxies proches observées au cours des trois premières années du programme MaNGA, qui utilise les deux spectrographes BOSS du telescope Sloan Foundation de 2,5 mètres de l’observatoire Apache Point au Nouveau-Mexique. Les principales données publiées comprennent des cartes de galaxies, de nouveaux outils d’affichage et de visualisation des données, mais aussi une immense "bibliothèque stellaire".

Le but de MaNGA est de comprendre "l'histoire de la vie" des galaxies actuelles, depuis leur naissance et leur assemblage, en passant par leur croissance en passant par la formation et la fusion d'étoiles, jusqu'à leur mort après l'arrêt de la "pouponnière" leur ayant donné naissance. Bundy et ses étudiants à l'UC Santa Cruz, par exemple, ont découvert de sérieux indices dans les données de MaNGA démontrant l'existence de "fuites" de gaz ionisé chaud dans les galaxies mortes, confortant l'hypothèse que des vents puissants chassés du trou noir central de ces galaxies peuvent empêcher la formation de nouvelles étoiles.

L'équipe de Bundy cherche également des indices sur la manière dont les galaxies se sont assemblées au fil du temps en étudiant les mouvements individuels de leurs étoiles et de leurs gaz et en analysant les signatures chimiques de ces étoiles dans différentes parties des galaxies.
 

 
 
A gauche, une galaxie spirale observée en lumière visible. L'hexagone rouge montre la couverture de l'instrument MaNGA. A droite, la même galaxie spirale, montrant de quelle façon les capteurs reliés aux fibres optiques de l'instrument peuvent la résoudre afin d'obtenir autant de spectres séparés.
Crédit : Collaboration SDSS / MaNGA.
 

MaNGA étudiera à terme un échantillon représentatif d’environ 10.000 galaxies proches. Selon Bundy, le programme a atteint la moitié de cet objectif et devrait être complété d'ici 2020. "Cette publication de données est une étape majeure pour nous", déclare le chercheur. "MaNGA est déjà de loin la plus grande prospection de ce type et cette publication inclut à la fois les données et les outils analytiques développés par le projet."

Une autre partie importante de cette publication de données est la bibliothèque stellaire MaNGA contenant les spectres de plus de 3000 étoiles de notre galaxie, la Voie Lactée. Une fois terminée, elle comprendra 5000 à 6000 étoiles. Les chercheurs peuvent utiliser les spectres individuels de ces étoiles pour tenter de reconstruire le spectre d'une galaxie entière et déterminer ainsi le modèle unique auquel elle répond.

"La bibliothèque stellaire MaNGA est la plus grande bibliothèque d'étoiles jamais compilée, avec les spectres obtenus par les mêmes instruments que ceux utilisés pour les galaxies. C'est donc un outil très puissant pour comprendre la nature de ces populations stellaires", a déclaré Bundy.

Le programme de recherche MaNGA utilise les deux spectrographes BOSS du télescope Sloan Foundation de 2,5 mètres de l’observatoire Apache Point au Nouveau-Mexique, équipés d'une nouvelle génération de capteurs, des "unités de champ intégrées" spécialement conçues, chacune composée de réseaux de fibres optiques très compacts, permettant la mesure de spectres en de nombreux points de la même galaxie. Les spectres MaNGA fournissent une couverture continue, depuis les longueurs d'ondes optiques jusqu'aux proches infrarouges.

Jean Etienne

Sources principales :

MaNGA data release includes detailed maps of thousands of nearby galaxies. Université de Californie – Santa Cruz, 29 janvier 2019.

MARVIN, site d'accès aux données MaNGA.  

 

 
L'instrument MaNGA permet d'obtenir des spectres sur toute la surface des galaxies cibles à l'aide de faisceaux de fibres conçus sur mesure. La partie inférieure droite illustre comment le réseau de fibres échantillonne spatialement une galaxie particulière. La partie supérieure droite compare les spectres observés par deux fibres à différents endroits de la galaxie et montre en quoi le spectre des régions centrales diffère considérablement des régions extérieures. Cliquer sur l'image pour agrandir.
Crédit : Dana Berry / SkyWorks Digital Inc., David Law et la collaboration SDSS.
 

 

 
 
 

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