5 avril 2019

 

Les moteurs des satellites au seuil d'une rupture technologique

 
Les moteurs-fusées devant fonctionner en dehors de l'atmosphère terrestre reposent sur l'emploi d'hypergols, dangereusement toxiques et particulièrement instables. Une nouvelle classe de combustibles pourrait apparaître bientôt.

Actuellement, la position des satellites et stations spatiales devant rester très longtemps en orbite dépend des hypergols, des combustibles si réactifs qu'ils s'embrasent spontanément dès qu'ils entrent en contact avec un comburant autre que l'oxygène. Les hypergols les plus utilisés jusqu'à présent reposent sur l'hydrazine, un composé chimique d'atomes d'azote et d'oxygène hautement toxique et dangereusement instable.

La manipulation de ces produits hautement cancérigènes requiert des précautions hors normes, au point que les personnes qui l'utilisent lors de leur travail doivent revêtir des combinaisons protectrices semblables à celles utilisées par les astronautes. Et malgré toutes les précautions mises en place, on estime qu'environ 12.000 tonnes de combustible à base d'hydrazine sont rejetées das l'atmosphère par l'industrie aérospatiale.
 

 

 
La Station Spatiale Internationale. Crédit : NASA.
 

Selon une publication parue ce 5 avril 2019 dans Science Advances, il pourrait être possible de créer un combustible pour fusées tout aussi efficace, mais aussi beaucoup plus propre et sécuritaire que les hypergols utilisés jusqu'à aujourd'hui. Leur fonctionnement reposerait sur l'utilisation de "déclencheurs" chimiques qui ont pour effet de libérer l'énergie de l'un des nouveaux matériaux les plus en vogue actuellement, une classe de solides poreux appelés réseaux de coordination organométallique, ou MOF (metal-organic frameworks). Les MOF sont faits d'agrégats d'ions métalliques reliés entre eux par une molécule organique appelée ligand.

"Il s'agit d'une nouvelle approche, plus propre, de création de combustibles hautement inflammables, qui, bien qu'ils ne soient pas particulièrement plus sécuritaires que ceux que nous utilisons actuellement, ont un temps de réaction et de combustion très court, une qualité essentielle des combustibles de fusée", explique Tomislav Friscic, professeur au Département de chimie de l'Université McGill et coauteur principal de l'article avec l'ancien chercheur de McGill, Robin D. Rogers.

"Même si nous n'en sommes encore qu'aux premiers stades de travail en laboratoire avec ces matériaux, les résultats obtenus laissent penser que l'on pourra mettre au point une classe de nouveaux hypergols plus propres et hautement configurables pour l'industrie aérospatiale", indique le premier auteur de l'article Hatem Titi, chercheur postdoctoral qui travaille au laboratoire de Tomislav Friscic.

Ce dernier aimerait commercialiser cette nouvelle technologie. Pour ce faire, il travaille actuellement avec l'Université McGill et Acsynam, une société issue de l'essaimage de son propre laboratoire.

Jean Etienne

Sources principales :

Hypergolic zeolitic imidazolate frameworks (ZIFs) as next-generation solid fuels: Unlocking the latent energetic behavior of ZIFs. Publication complète dans Science Advances, 5 avril 2019.

Rocket fuel that’s cleaner, safer and still full of energy. Université Mc Gill, 5 avril 2019.

Vidéo explicative de l'Université Mc Gill.
 
 

 

 

 

 
 
 

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