1er mars 2016

 

Ondes gravitationnelles : la Chine lance ses propres programmes de recherche

 
Au lendemain de la découverte des ondes gravitationnelles au moyen de l'interféromètre LIGO, la Chine dévoile ses propres programmes de recherche dans ce domaine, mettant en œuvre au moins six satellites et plusieurs laboratoires de grande ampleur.

Alors que pour l'année 2014, la Chine a consacré 2,08 % de son PIB à son programme de R&D (Recherche & Développement), les investissements dans la recherche fondamentale n'ont représenté que 4,7 % de cette dépense. Les chercheurs de l'Académie des Sciences de Chine réagissent à présent, attirant l'attention du gouvernement sur le fait que la rigidité des programmes mis en place par les autorités ont eu pour principal effet de circonscrire les financements à certains domaines-clé, limitant ainsi les investissements d'envergure en recherche fondamentale.

La prise de conscience de la part des autorités chinoises a été immédiate et, devant les énormes perspectives offertes par le nouveau domaine scientifique promis par l'observation des ondes gravitationnelles, le gouvernement chinois a décidé d'intégrer immédiatement ce sujet de recherches au plan spatial 2050 de l'Académie des Sciences de Chine, présageant la priorisation d'investissement sur cette thématique.

Il n'aura ainsi fallu que trois semaines pour que la Chine se mobilise et mette en route ou confirme de nombreuses initiatives afin de travailler activement sur le sujet, parmi lesquelles on relèvera :

Le projet Tianqin (« Sky Harp »)

Le projet d’ondes gravitationnelles, Tianqin (« Sky Harp »), initié par l’Université Sun Yat-sen de Canton en juillet 2015 est en attente d’autorisation de la part du gouvernement et devrait coûter, selon les estimations, 15 milliards de yuans (plus de 2 milliards d’euros).

Divisé en 4 étapes qui s’étendront sur les 15 à 20 prochaines années, le projet Tianqin implique le lancement conjoint de trois satellites qui devront être positionnés en orbite en formant un triangle équilatéral, sur un modèle analogue au projet européen eLISA. Le programme vise la détection des ondes gravitationnelles émises par les systèmes binaires dont la période est de l’ordre de quelques minutes. De nombreux pays ont déjà exprimé leur intérêt à être partenaires du projet, dont la France. L’Université Sun Yat-sen prévoit par ailleurs la construction d’un observatoire et d’un laboratoire au sol de très grande envergure, situé à Zhuhai dans la province du Guangdong.

Le projet Ali

Le projet de l’Institut de physique des hautes énergies de l’Académie des sciences de Chine, Ali, a pour objectif l’observation des ondes gravitationnelles primaires issues du Big Bang pour en apprendre plus sur leur origine. La première étape de ce projet représente un investissement de 100 million de yuans pour des résultats espérés d'ici seulement 5 années.

Le projet Taiji

Le projet d’onde gravitationnelle de l’Académie des sciences de Chine, Taiji, initié en 2008 se penche sur les technologies satellites de détection de ce type d’ondes, sans réalisation réellement concrète à ce jour. Il prévoit maintenant le lancement de trois satellites d’ici 2030 pour la détection d’ondes gravitationnelles de basses et moyennes fréquences.

Interaction avec le projet eLISA

Des chercheurs de l’Académie des sciences de Chine sont par ailleurs en train de rédiger un plan de collaboration avec le projet eLISA de l’Agence Européenne Spatiale. Ce plan, qui devra être préalablement autorisé par les autorités chinoises prévoirait deux alternatives : la première serait la participation financière avec l’acquisition de 20% des parts du projet européen par la partie chinoise, et la seconde option serait le lancement de satellites chinois en 2033 pour venir compléter les résultats apportés par eLISA.

Il est à noter qu'avant cette décision, sur 133 structures de recherches au niveau mondial, seule l'Université de Tsinghua de Pékin avait pris part, pour la Chine et sous forme de collaboration, à un projet international de détection d'ondes gravitationnelles.

Verrons-nous un jour les autorités occidentales réagir aussi rapidement devant une opportunité aussi exceptionnelle ?

Jean Etienne

Sources principales :

China Innovates Sci-Tech Research to Catch Next "gravitational wave" (Chinese Academy of Sciences, 18 février 2016).
China Plans Gravitational Wave Project (Chinese Academy of Sciences, 17 février 2016).
CAS Announces Third Chinese Gravitational Waves Research Project (Chinese Academy of Sciences, 18 février 2016).
Two Alternatives for Chinese Involvement in Gravitational Wave Research (Chinese Academy of Sciences, 17 février 2016).
Observation of Gravitational Waves from a Binary Black Hole Merger (Physical Review Letters, 116, 061102 - 11 février 2016).

Sur Space News International :

>>>  Première observation directe d'ondes gravitationnelles (12 février 2016).
>>>  Les deux trous noirs à l'origine d'ondes gravitationnelles auraient pu se trouver à l'intérieur d'une étoile gigantesque (19 février 2016).

 

 

 
La détection d'ondes gravitationnelles par des moyens terrestres a été une surprise pour tous les scientifiques, alors qu'on pensait ne pouvoir les observer que par interférométrie depuis l'espace au moyen de satellites reliés entre eux par faisceaux laser. Pour situer la difficulté, nous mentionnerons que l'onde gravitationnelle induite par une collision de trous noirs à 10 millions d'années-lumière de la Terre induit une déformation géométrique de notre planète dont l'amplitude atteindrait, en surface, environ le dixième du diamètre d'un atome d'hydrogène.
 

 

 
 
 

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