9 décembre 2014

 

Le grand retour des fusées géantes

 
La Chine développe un nouveau lanceur de très grande puissance en vue de l'exploration de la Lune ainsi que des futures missions dans l'espace profond, révèlent aujourd'hui les médias d'Etat.

Ce n'est pas une surprise. On savait déjà que la Chine, après avoir maîtrisé le vol humain, ambitionne de disposer de sa propre station spatiale, dont un embryon est déjà en orbite (Tiangong-1), puis de déposer des hommes sur le sol de notre satellite. Mais les fusées actuelles ne peuvent satisfaire à la réalisation d'un tel programme, à moins d'accepter la complexification de lancements multiples et d'assemblages en orbite.

D'aucuns rétorqueront que la Station Spatiale Internationale (420 tonnes) a été réalisée sur ce scénario. D'autres feront judicieusement remarquer que les 36 missions de la navette spatiale nécessaires à l'assemblage de cet immense Meccano (sans compter les lancements Proton et Soyouz) auront coûté bien plus que les quatre lancements qui auraient amplement suffi en utilisant l'antique Saturne 5 lunaire, capable de satelliser 120 tonnes en orbite basse.

Reflet du programme de conquête lunaire lancé par le Président Kennedy, la Saturne 5 avait été conçue dans ce but. Le principe d'un tir direct du "train spatial" complet vers notre satellite avait en effet été jugé plus opportun qu'un assemblage en orbite, tandis que l'URSS (avec trois ans de retard sur les USA) concevaient dans le même but leur fusée N1, dont les quatre lancements s'étaient conclus par un feu d'artifice de légende…

Une avancée prudente

Mais toute comparaison s'arrête là. Car si les Saturne 5 et autres N1 ont été développées dans la précipitation sur fond de guerre froide, la Chine non seulement dévoile ses intentions (l'existence de la N1 avait été révélée qu'après la chute de l'URSS, soit 20 ans plus tard), mais fait preuve d'une sage prudence dans ses réalisations.

Li Tongyu, chef des programmes aérospatiaux à l'Académie chinoise des technologies des véhicules de lancement, déclare ainsi à la presse : "Nos lanceurs actuels, y compris le Longue Mache-5 (25 tonnes en orbite basse, ndlr), dont le premier lancement interviendra bientôt, seront en mesure de poursuivre les activités spatiales programmées pour les 10 prochaines années. Mais pour les programmes spatiaux à long terme de la nation, leurs capacités ne suffiront pas".

Et il annonce dans la foulée la réalisation future d'un tout nouveau lanceur d'environ 3000 tonnes et d'un diamètre d'environ 10 mètres, dont le premier tir serait effectué aux environs de 2028. Cette "Longue Marche 9", ainsi dénommée par China Daily, serait équipée de moteurs à kérosène et oxygène liquide de 460 tonnes de poussée chacun pour le premier étage, et de 220 tonnes de poussée à hydrogène/oxygène liquides pour les étages supérieurs. Elle serait capable de satelliser dans un premier temps 130 tonnes en orbite basse.

Li Jinghong, un concepteur de l'Académie des Sciences chinoise, a déclaré cette fusée serait non seulement utilisée pour des missions vers le satellite naturel de la Terre, mais aussi pour d'autres projets d'exploration de l'espace profond.

Et pendant ce temps-là…

On ne peut s'empêcher de comparer cette annonce avec les intentions de la Nasa, dont le Space Launch System (SLS) devrait décoller pour la première fois en 2018 avec une charge utile de 70 tonnes. Ou encore de la Russie, avec l'annonce en octobre dernier par Yuri Makarov, responsable de l'Agence spatiale russe Roscosmos, de l'approbation par Vladimir Poutine de la mise en chantier d'un lanceur d'une capacité de 150 tonnes. Avec chaque fois en toile de fond la Lune, l'espace profond.
 

Voir aussi sur notre site :

>>>  La Russie repart à l'assaut de la Lune
>>>  Lune-Orbite, le nouveau programme russe d'exploration lunaire, prend forme… sur le papier
>>>  L’Inde et la Chine accèdent progressivement aux postes-clés de l'exploration spatiale


Sources (entre autres) :

China Daily, English-People Daily, Space Daily
 

 

 
Avec une masse de 3000 tonnes pour une hauteur de 121 mètres, le SLS américain est actuellement le plus
abouti des projets. La première version (à gauche) devrait voler en 2018 avec une capacité d'emport de 70
tonnes en orbite basse. Les futures évolutions porteront la charge satellisable à 130 tonnes. Crédit Nasa.
 
 
 

 
Décollage de SLS (vue d'artiste). Crédit Nasa.
 

 

 
 
 

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